Investir dans un logement locatif intermédiaire : le LLI privé

ANALYSE - La fin du dispositif « Pinel » en décembre 2024 contribue au ralentissement marqué de l’activité du secteur de la construction. Ce dispositif avait l’avantage de sa continuité avec les dispositifs qui se sont succédé, de Périssol au De Robien en passant par le Scellier. L’investisseur privé achetait un logement neuf qu’il s’engageait à louer et en contrepartie il pouvait bénéficier d’une déduction ou d’une réduction d’impôt sur le revenu pendant son engagement de location.

Par Bertrand LUCAS, Notaire associé Pôle construction et immobilier d’entreprise, Notaires 3 Turbigo

 

Le montant de la réduction d’impôt du dispositif Pinel n’a cessé d’évoluer au fil du temps pour atteindre une réduction d’impôt de 21 % pour un engagement de location de 12 ans. 

Le dispositif LLI privé ne fonctionne pas sur la même logique de réduction d’impôt sur le revenu, mais sur une réduction de TVA à l’achat du logement et sur le remboursement de la Taxe Foncière sur les Propriétés Bâties (TFPB) pendant la durée de location, ce qui pourra dégager une économie d’impôt globale non négligeable de l’ordre de 15 %. 

Longtemps réservé aux investisseurs institutionnels, le Logement Locatif Intermédiaire a été rendu accessible aux particuliers par la loi de finances pour 2024 sous réserve du respect de certaines conditions, notamment celle de créer une société, qui peut être une simple SCI (société civile immobilière).

 

  1. Quels sont les avantages fiscaux liés à l’investissement dans un logement locatif intermédiaire (LLI) privé ?

Si toutes les conditions cumulatives ci-après décrites sont remplies, la TVA sur le prix d’acquisition du LLI sera réduite à 10 %[1] au lieu et place du taux de 20% applicable habituellement sur un logement neuf.

Le Code Général des Impôts[2] prévoit le remboursement par l’État de la Taxe Foncière sur les Propriétés Bâties (TFPB) pendant 20 ans, soit au moyen d’un remboursement direct, soit par imputation sur l’impôt sur les sociétés, si la société porteuse de l’investissement est soumise à cet impôt. La créance de remboursement est égale au montant de la taxe foncière, à l’exception de la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères (TEOM) récupérable sur le locataire.

 

  1. Quels sont les investisseurs éligibles ?

Toutes les personnes morales sont admises à l’achat des LLI, sans égard à leur statut juridique ou fiscal ni à la qualité de leurs membres. Ainsi, un particulier investisseur devra créer par exemple une SCI pour accéder à cette forme d’investissement ou souscrire directement au capital d’une société d’investissement immobilier de type SCPI (société civile de placement immobilier).

Dans les opérations en démembrement de propriété (usufruit/nue-propriété), l’investisseur pourra être une personne physique si le bailleur usufruitier est une personne morale dont le capital est détenu, directement ou indirectement, en totalité par des personnes passibles de l’impôt sur les sociétés.

Il est vrai que la création d'une société ajoute une certaine formalité à cet investissement, mais établir une SCI n'est ni compliqué ni coûteux. De plus, la création d'une telle société de gestion privée offre une excellente opportunité pour se poser les bonnes questions en matière de transmission patrimoniale.

 

  1. Qu’est-ce qu’un LLI ?

Le LLI offre une gamme alternative de logements locatifs dans les régions à forte tension du marché locatif. Du point de vue des locataires, il cible les ménages disposant de ressources à la fois trop élevées pour disposer d’un logement social, mais souvent insuffisantes pour présenter une candidature compétitive dans la recherche d’un logement confortable sur le marché libre.

Un LLI est un logement neuf ou entièrement réhabilité à l’état neuf, qu’un investisseur s'engage à louer à un loyer plafonné à un locataire, personne physique, dont les revenus ne dépassent pas certains plafonds et qui en fait sa résidence principale. 

Le dispositif s’applique aussi bien aux logements loués nus, qu’aux logements destinés à la location meublée, y compris dans les résidences-services si la location n’est pas soumise à la TVA. 

 

  1. Quelles sont les conditions de localisation géographique du logement ?

Les logements éligibles doivent être situés dans les zones géographique A, A bis ou B1, c’est-à-dire dans les zones où le marché locatif est tendu. 

Les logements situés dans la zone B2 ou C peuvent être éligibles à certaines conditions, notamment dans les communes accueillant des projets d’intérêt national majeur ou dans le périmètre d’une grande opération d’urbanisme.

 

  1. Quels sont les programmes neufs éligibles ?

Les LLI doivent être intégrés dans un programme favorisant la mixité sociale, c’est-à-dire intégrant au minimum 25 % de logements locatifs sociaux[3]. Toutefois, cette condition n’est pas exigée pour les logements situés :

  • dans les communes comptant déjà plus de 25 % de logements sociaux[4] ;
  • ou dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV)[5].

En pratique, cette exigence sera satisfaite dans de nombreux programmes neufs en raison des règlementations d’urbanisme en vigueur.

 

  1. Quels sont les plafonds de loyer ?

Les plafonds de loyer mensuel par mètre carré des logements loués nus, charges non comprises, sont identiques au Pinel. Ils sont fixés, pour les baux conclus en 2025, à :

ZONES[6]

A bis

A

B1

B2 et C

PLAFONDS

19,51 €

14,49 €

11,68 €

10,15 €

 

  1. Quelles sont les conditions de ressources des locataires ?

Elles sont identiques au Pinel, pour les baux conclus en 2025 :

ZONES

A bis

A

B1

B2 et C

Personne seule

43 953 €

43 953 €

35 825 €

32 243 €

Couple

65 691 €

65 691 €

47 842 €

43 056 €

Personne seule ou couple ayant une personne à charge

86 112 €

78 963 €

57 531 €

51 778 €

Personne seule ou couple ayant deux personnes à charge

102 812 €

94 585 €

69 455 €

62 510 €

Personne seule ou couple ayant trois personnes à charge

122 326 €

111 971 €

81 705 €

73 535 €

Personne seule ou couple ayant quatre personnes à charge

137 649 €

126 001 €

92 080 €

82 873 €

Majoration par personne à charge à partir de la cinquième

+ 15 335 €

+ 14 039 €

+ 10 273 €

+9 243 €

 

  1. Quelles sont les conséquences du non-respect de l’engagement de location pendant 20 ans ?

Le principe est que la location d’un LLI doit durer au moins 20 ans, sous peine de remise en cause du taux réduit de TVA, c’est-à-dire d’avoir à supporter un complément de TVA de 10% pour atteindre le taux de 20 % normalement exigible lors de l’achat d’un logement neuf.

Toutefois, il existe une exception majeure à ce principe : le Code Général des Impôts[7] précise que le complément de TVA ne sera pas dû si le non-respect de l’engagement de location résulte de la vente du logement à compter de la 16e année suivant l’achèvement. 

Dans le cas où l’investisseur posséderait plusieurs LLI, des ventes pourront également intervenir à compter de la 11 e année à condition qu’elles ne portent pas sur plus de 50% des LLI acquis par l’investisseur.

En d'autres termes, si un investisseur acquiert un seul LLI, il pourra le revendre sans perdre le bénéfice du taux réduit de TVA à partir de la 16e année suivant son achèvement. En revanche, s'il en acquiert plusieurs, il pourra revendre la moitié de ces logements à partir de la 11e année suivant leur achèvement.

 

  1. Quelles sont les obligations déclaratives de l’investisseur ?

Une obligation déclarative incombant à l’investisseur a été prévue par décret[8]. Elle consiste à fournir via le site internet du ministère du logement, des informations relatives à l'identité de l'acquéreur, la localisation et les caractéristiques du programme et du logement, etc.

Un arrêté à paraître déterminera les modalités d’une déclaration périodique via une téléprocédure en lien avec le ministère du logement.

En conclusion : Le mécanisme de l'investissement LLI se distingue des régimes de déduction ou de réduction d'impôt qui se sont succédé pendant des décennies pour encourager l'achat de logements neufs. Cependant, les économies réalisées sur la TVA à l'achat et la taxe foncière pendant la gestion locative font du dispositif LLI un véritable outil patrimonial de défiscalisation.

 

 

[1] Article 279-0 bis A du Code général des impôts

[2] Article 220 Septies Z V du CGI

[3] Au sens du 1° du I de l’article 278 sexies du CGI

[4] Au sens de l'article L. 302-5 du Code de la construction et de l’habitation

[5] Au sens du 8° de l’article 278 sexies du CGI

[6] Pour le classement des communes par zones, il convient de se reporter au I-A-2 § 23 à 29 du BOI-IR-RICI-360-20-30.

[7] Article 284 II bis du CGI

[8] Décret n° 2021-1157 du 6 septembre 2021 relatif à l'obligation de transmission d'informations pour les livraisons de logements locatifs intermédiaires