Baux commerciaux : cession du droit au bail par le preneur

Un propriétaire bailleur peut-il empêcher son locataire de céder librement son bail commercial ?  

Selon l’article L.145-16 du Code de commerce, sont « réputées non écrites, quelle qu'en soit la forme, les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail ou les droits qu'il tient du présent chapitre à l'acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise ».

Une clause du bail ne peut donc pas interdire au preneur de céder son bail dans le cadre de la cession du fonds de commerce.

A l’inverse, la jurisprudence admet la validité des clauses interdisant expressément toute cession isolée du droit au bail.

Par ailleurs, qu’il s’agisse d’une cession isolée ou dans le cadre de la vente du fonds de commercée, sont licites les clauses qui, sans interdire la cession, imposent :

  • l’accord écrit du bailleur (voir par exemple C.Cass., 3ème civ., 14 avril 1982, Gaz. Pal. 2. Oan. Jurisp. P. 291) ;
  • l’intervention du bailleur à l’acte de cession du fonds de commerce ;
  • que l’acte de cession du fonds soit fait devant notaire ;
  • que le cédant soit garant des dettes du cessionnaire (toutefois, depuis la loi « Pinel » du 18 juin 2014, la solidarité ne vaut que pour trois ans maximum*) ;
  • que le cédant soit au préalable à jour de ses loyers ;
  • un droit de préemption au profit du bailleur.

Toutefois, une décision récente vient rappeler que, par exemple en présence d’une clause d’agrément, un propriétaire ne peut discrétionnairement bloquer la cession du bail en refusant de donner son accord.
Ainsi, « ayant relevé qu'aux termes du bail, la cession du droit au bail était subordonnée à la condition expresse d'avoir recueilli l'accord préalable et écrit du bailleur et que le refus opposé par Mme U... S... ne pouvait être discrétionnaire et devait revêtir un caractère légitime, la cour d'appel, qui a constaté que Mme U... S..., notifiant son refus à la locataire par lettre du 4 juillet 2014, n'alléguait aucun motif à l'appui de celui-ci (…), a pu, sans ajouter au bail, en déduire que ce refus était constitutif d'un abus justifiant l'indemnisation du préjudice causé » (Cour de cassation, 3ème ch.civ., 9 mai 2019, 18-14.540).

En l’espèce, et conformément à une jurisprudence constante, le preneur a donc été indemnisé en raison du fait du fait que la cession du bail a été abusivement bloquée par le propriétaire.   

Pour éviter un contrôle du juge sur les motifs invoqués par le propriétaire pour refuser de donner son accord à une cession, il peut être recommandé de privilégier les clauses interdisant purement et simplement la cession isolée du bail au lieu des clauses d’agrément (voir Administrer, juin 2019, p. 37). La présence d’une telle clause n’empêche d’ailleurs pas que le propriétaire puisse, finalement et le cas échéant, autoriser expressément une cession en particulier.

Ainsi, concrètement, le bail interdira la cession isolée du bail et, s’agissant d’une cession dans le cadre d’une cession du fonds de commerce, imposera l’accord préalable du propriétaire.
C’est le cas par exemple du bail UNPI référence 49-3.

Frédéric Zumbiehl • Juriste UNPI