Les locations de type « Airbnb » sous haute surveillance

Avec l’essor d’internet et des plateformes d’économie collaborative (Leboncoin, Airbnb, Abritel, etc.), les locations de meublés touristiques ont explosé en France. Fin 2018, 500.000 annonces étaient publiées sur le site « Airbnb »[1], dont plus de 60.000 à Paris, et autour de 10.000 à Lyon, Nice ou Bordeaux. Ce qui frappe, c'est notamment la multiplication des locations en ville. Si notre pays est devenu le second marché de la plateforme californienne après les Etats-Unis, c'est sans doute que les « Airbnb » répondent, côté visiteurs, à une quête d’expérience « authentique » – et peut-être meilleur marché qu’à l’hôtel –, tandis qu’ils permettent à de nombreux propriétaires de se procurer un complément de revenus. Pour des investisseurs, et selon les propres mots du Conseil d’Etat, il peut s'agir aussi d’échapper aux « règles relativement restrictives pesant sur la location des locaux nus – c’est un euphémisme –, incitant davantage les propriétaires à se tourner vers le marché plus rentable et moins risqué de la location meublée de courte durée »[2].

Cependant, malgré l'intérêt d'une diversification de l'offre d’hébergements touristiques, de plus en plus de villes accusent les locations de type « airbnb » de nuire à l'habitat résidentiel. Paris notamment évoque le chiffre de 20.000 logements disparus depuis 2009. Quand un logement est dédié à la location touristique, il n'est en effet plus disponible à l'année. En raison de leur rentabilité, elles sont aussi accusées de faire gonfler les prix de l'immobilier. On évoque aussi une usure accélérée des immeubles, liée à la rotation des occupants, tandis que les professionnels de l’hôtellerie dénoncent une concurrence déloyale. Dans ce contexte, les villes sont de plus en plus nombreuses à délibérer sur le sujet. Elles mobilisent en particulier la réglementation sur les changements d’usage, qui figure dans le Code de la construction et de l’habitation, mais aussi les nouvelles règles de déclaration prévues par le Code du tourisme. Les plateformes de locations entre particuliers se voient également sommées de collaborer avec les pouvoirs publics.

Le recours à la réglementation sur les changements d'usage

Les articles L.631-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation logent une ancienne réglementation relative aux changements d’usage. Instaurée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale pour lutter contre la pénurie de logements, profondément remaniée en 2005, elle interdit d'affecter un logement à un autre usage sans obtenir une autorisation du maire (en remplacement du préfet depuis 2009). L'article L.631-7 du CCH précise que l’usage d’un local s’apprécie à la date du 1er janvier 1970[3] et définit les locaux d'habitation comme « toutes catégories de logements et leurs annexes, y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de service, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés donnés en location dans les conditions de l'article L. 632-1 », ce qui inclut les locations meublées à usage d’habitation principale, mais également – depuis la loi ELAN du 23 novembre 2018 – les meublés loués dans le cadre d’un bail mobilité. Or, dès 2012, la jurisprudence a considéré que le fait de louer un logement pour de courtes durées constitue un changement d'usage. Cette solution a été consacrée par la loi ALUR du 24 mars 2014 : « le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile constitue un changement d'usage ». Louer un logement via Airbnb suppose donc de solliciter une autorisation préalable en mairie. Toutefois, la même loi a sanctuarisé les résidences principales, qui peuvent être louées jusqu’à quatre mois par an (art. L.631-7-1 A du CCH).

Théoriquement, cette réglementation est applicable de plein droit « aux communes de plus de 200 000 habitants et à celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne ». En réalité, ce dispositif est en sommeil dans de nombreuses villes de la petite couronne parisienne et dans plusieurs grandes villes, en tout cas vis-à-vis des locations touristiques. Ces villes ne communiquent pas sur la règlementation des changements d’usage et laissent les propriétaires louer librement en « airbnb » des logements, que ceux-ci constituent leur résidence principale ou non. Rennes Métropole, que nous avons contactée, indique par exemple que « l’offre de logements à l’année y est suffisante » pour ne pas avoir à entraver la liberté des propriétaires. Les locations touristiques ne sont donc en réalité encadrées que dans les villes ayant choisi d’« activer » la réglementation prévue par le CCH, en la relayant généralement par des délibérations locales. Paris l’a fait dès le début des années 2010, rejointe plus récemment par Marseille, Nantes ou Strasbourg.

A leur tour, des villes de taille moyenne ou petite décident d’encadrer les changements d'usage. En effet, depuis la loi ALUR de 2014, la règlementation peut être rendue applicable « par une délibération de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale [EPCI] compétent en matière de plan local d'urbanisme ou, à défaut, du conseil municipal » dans toutes les « zones tendues », là où la taxe sur les logements vacants est applicable. Cela concerne potentiellement 1 149 communes ! Saint-Cyr-sur-Mer, dans le Var, Versailles, ou encore la Communauté d'agglomération Pays Basque[4], par exemple, ont ainsi soumis à autorisation les changements d’usage sur leur territoire[5].

A l’instar de la Commission des affaires économiques du Sénat, on peut regretter qu’« à ce jour, il n’existe aucun recensement au fil de l’eau et centralisé des délibérations des communes et intercommunalités ayant mis en place le changement d’usage »[6]. Il appartient donc à chaque propriétaire intéressé de se renseigner au niveau local sur les règles applicables. Cependant, nous saisissons l’occasion de cette enquête pour tenter de récapituler, dans l’encadré ci-après, les villes concernées et les principales règles appliquées.

La notion de résidence principale

Selon l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 sur les baux d'habitation, auquel renvoie l'article L.631-7-1 A du CCH, « la résidence principale est entendue comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge ». Il est donc impossible de louer un logement plus de 4 mois, soit 120 jours par an, sauf à ce que ce logement ne puisse plus être considéré comme une résidence principale. Comme le précise l'article 2, des raisons particulières (séjour à l’hôpital, mission à l’étranger, etc.) peuvent néanmoins justifier qu’un logement – résidence principale puisse être occupé moins de huit mois par an, et donc que des locations touristiques y soient pratiquées plus de 120 jours par an.

Dispositifs spécifiques aux transformations de logements en meublés touristiques (hors résidence principale)*

Communes visées à l’article L.631-7 du CCH (non exhaustif)

 

Obligation de compensation et, le cas échéant, carac- téristiques exigées des locaux présentés en compensation (non exhaustif)

 

Autorisation temporaire pour particuliers uniquement

 

Télédéclaration avec numéro d’ enregistrement

 

Durée initiale

Nbre renouvel. possibles

Nbre maxi d’autorisat° par propr. (ou foyer fiscal)

Paris (centre & ouest = secteur de compensa- tion renforcée)

Surface double exigée (sauf création logements conventionnés) dans n’importe quel arrondissement du secteur (sous réserve exigence que 50 % au moins soit situé dans même arrondissement pour secteur ultrasensible)

Aucune possibilité

Oui, depuis le 1er décembre 2017

Paris (autres secteurs)

Surface équivalente dans même arrondissement exigée

Aucune possibilité

Oui, depuis le 1er décembre 2017

Marseille

Oui, a priori surface équivalente exigée

6 ans

A priori illimité

5 (par foyer fiscal)

Non (déclaration papier)

Lyon (hypercentre)

Surface équivalente dans même arrondissement exigée

9 ans

0 1 Oui

Uniquement logements de moins de 60 m2 (rappel : réservé aux personnes physiques)

Oui

Lyon (autres secteurs)

Surface équivalente dans même secteur exigée si demande d’autorisation définitive sollicitée (transmissible en cas de vente)

Autorisation temporaire illimitée possible dans tous les cas (personnes morales ou physiques, logements supérieurs à 60 m2)

Oui

Toulouse

Oui a priori

2 ans

non précisé 2 Oui, depuis 2019

Nice

Surface de compensation équivalente située n’importe où dans la Ville exigée

6 ans 0 1 (par foyer fiscal)

Oui, depuis le 1er juillet 2017

Nantes

Surface de compensation équivalente située dans le même quartier exigée

4 ans

 

1

 

1

Oui, depuis le 1er janvier 2019

Montpellier

Aucune délibération spécifique

Strasbourg

 

Surface équivalente dans même secteur exigée. Surface x 1,5 en secteur de compensation renforcée (sauf création de logements conventionnés). Exigence de compensation semble exclue dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville

9 ans 0 2 Non (déclaration papier)

Bordeaux

Surface équivalente dans même secteur ou secteur plus central exigée

Aucune possibilité

Oui, depuis le 1er mars 2018

Lille

Compensation exigée pour tous les logements situés en zone 1, pour certains logements en zone 2 (ex. : logements en accession sociale, log. de 3 pièces ou + ou de plus de 60 m2) et en zone 3 (idem et log. de 4 p. ou + ou de plus de 70 m2). Le cas échéant, surface équivalente dans même zone exigée

2 ans 2 1

Oui, depuis le 1er janvier 2019

Rennes

Aucune délibération spécifique

Boulogne -Billancourt & Issy- les-Moulineaux (via Grand Paris Seine Ouest)

Surface équivalente exigée

Aucune possibilité

Oui

Vanves, Sèvres et autres communes de GPSO

Surface équivalente exigée

3 ans Non précisé 1

Oui, sauf Marnes-la-Co- quette et Ville- d’Avray

Neuilly-sur- Seine

Surface équivalente exigée

Aucune possibilité

Oui, depuis 1er juillet 2018

Levallois-Perret

Surface équivalente a priori exigée (sauf transfo partie local), selon délibération de 2009

Aucune possibilité officielle

Oui

Communes visées à l’article L.631-9 du CCH (non exhaustif)

Obligation de compensation et, le cas échéant, caractéristiques exigées des locaux présentés en compensation (non exhaustif)

 

Autorisation temporaire pour particuliers uniquement**

 

Télédéclaration avec numéro d’ enregistrement

 

Durée initiale

Nbre renouvel. possibles

Nbre maxi d’autorisa- tions par propr. (ou foyer fiscal)

Aix-en-Pro- vence (13)

Non précisé

3 ans 5

A priori illimité

Oui, depuis le 2 mai 2018

Versailles (78)

Surface équivalente exigée

9 ans à priori 0 1 Oui

24 communes de l’agglo Pays Basque (Côte basque et nord Labourd)

Non précisé

Oui à Bidart, depuis le 1er janvier 2018

Saint-Cyr-sur- Mer (83)

Non précisé

3 ans

A priori illimité

A priori illimité

non (déclaration papier)

Sète (34)

Non précisé

Oui

Annecy (74) et communes limitrophes (via agglo)

Non précisé 5 ans A priori illimité A priori illimité Oui à priori à Annecy

A priori sous réserve de classement (meublé de tourisme, gîte, etc)

Saint-Paul-de- Vence (06)

Non précisé 3 ans A priori illimité A priori illimité

Oui, depuis le 15 mars 2018

Roquebrune Cap-Martin (06)

Non précisé

10 ans

A priori illimité 3

Oui, depuis le 1er mai 2018

Martigues (13)

Principe d’une autorisation exigible (aucune autre précision)

Oui, depuis le 1er mars 2018

Menton (06)

Non précisé

2 ans

2 3

Oui, depuis le 1er janvier 2018

* Nous excluons volontairement les villes de Biarritz, Cannes et Nîmes dont les décisions nous paraissent illégales

** Certaines villes pourraient l’ouvrir aux personnes morales également (Menton, Aix-en-Provence ?)

La réglementation des meublés de tourisme parfois détournée de son objectif

Les articles L.631-7 et suivants du CCH font partie d’un titre dédié aux « dispositions tendant à maintenir ou à augmenter le nombre des logements ». Il est précisé que les autorisations de changement d’usage sont délivrées « au regard des objectifs de mixité sociale (…) et de la nécessité de ne pas aggraver la pénurie de logements » (art. L.631-7-1 du CCH). Aussi, la majorité des délibérations locales visent la nécessité de trouver un équilibre entre développement de l’offre d’hébergements touristiques et protection du parc résidentiel. Comme l'indique Martigues, il s'agit plus largement d'éviter la « transformation de certains quartiers en zones exclusivement touristiques avec en particulier, la disparition de la vie de quartier » et que Paris ne devienne « effectivement une ville musée »[7].
Cependant, on est étonné de constater ici ou là des références à la nécessité de protéger « la profession hôtelière qui subit une concurrence déloyale » (Boulogne-Billancourt), ou celle de « percevoir la taxe de séjour, [et d’] amener par conséquent plus de ressources à la mairie » (Cannes). On ne voit pas non plus à quel titre certaines communes évoquent la « dégradation des (…) espaces communs des copropriétés en raison d'une forte rotation » (Bidart), exigent de « justifier que le règlement de copropriété ne s’oppose pas au changement d’usage ou à défaut l’accord de la copropriété » (Nantes), ou encore d’attester sur l’honneur que le logement loué répond aux normes de décence (Aix-en-Provence). Sans évoquer Grand-Annecy, qui paraît conditionner l'autorisation de louer en meublé, ou du moins le renouvellement d’une telle autorisation, à une obligation de classement par un organisme accrédité ! Comme l'a noté la Commission des affaires économiques du Sénat, ces « délibérations s’apparent[ent] à du détournement de pouvoir, dans la mesure où une déclaration soumise à enregistrement n’a été adoptée que pour mieux recouvrer la taxe de séjour ou pour contrôler la qualité des hébergements, ce qui n’est pas la vocation de ce régime, qui a pour seul objectif de concourir à la lutte contre la pénurie de logement ». 

Une autorisation conditionnée à compensation dans de nombreuses villes

S’agissant des logements qui ne constituent pas la résidence principale de leur propriétaire, l’article L.631-7-1 CCH prévoit que l’autorisation « peut être subordonnée à compensation sous la forme de la transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage ». L’autorisation est alors qualifiée de « réelle » ; le changement d’usage est définitif et profite à l’acquéreur en cas de vente des locaux. Dans les autres cas, l’autorisation n’est que personnelle et temporaire : « elle cesse de produire effet lorsqu'il est mis fin, à titre définitif, pour quelque raison que ce soit, à l'exercice professionnel du bénéficiaire » ou en cas de vente. Or Paris, Bordeaux ou encore Lyon, imposent une compensation pour changer l’usage d’un logement. D'autres villes ne l'imposent que sur une partie du territoire (Lyon) ou uniquement pour les logements dépassant une certaine taille (Lille). Notons que, en zone d’application facultative de la règlementation des changements d’usage, Versailles semble être la seule ville à imposer une compensation.

Concrètement, en cas d’autorisation soumise à compensation, le propriétaire devra soit transformer en logement un autre local lui appartenant et jusque-là dédié à un autre usage, soit signer une convention de cession de commercialité avec un tiers. Il s’agit de négocier avec une personne qui réalise l’opération inverse (transformation d’un local d’activité en local à usage d’habitation) le droit de faire valoir cette opération comme compensation dans le cadre du projet de création d’un meublé de tourisme. Selon le portail de la Ville de Paris, les « droits de commercialité » sont vendus au prix de « 400 € par m² jusqu’à 3.000€ par m² dans les arrondissements de l’ouest et du centre de la capitale où la demande est la plus forte ». L’opération est complexe et onéreuse, mais la Ville suggère sur son site que… cela peut valoir le coup : « la dépense apparaît économiquement justifiée : rentabilité entre 1,6 et 2 fois plus qu’en location nue (Etude APUR 2011), et un investissement rapidement remboursé : pour un studio de 20 m² coût de 20K€ qui pourrait être remboursé en moins de 8 mois (avec recette de 1.000€/semaine et taux d’occupation à 60%) ». L’Eurométropole de Strasbourg ne nous a pas tenu le même discours : « une seule autorisation a fait l’objet d’une compensation depuis 2016. La règle a surtout vocation à être dissuasive (techniquement et financièrement) et plusieurs demandes ont été retirées avec abandon du projet ». Quant à Edouard Bertron, responsable du centre Changement d’usage à Bordeaux-Métropole, il nous a indiqué que « six demandes de compensation ont été déposées depuis le 1er mars 2018 ». Précisons que les caractéristiques exigées des locaux de compensation (surface, localisation, etc.) différent selon les villes.

Le repêchage des résidences « secondaires » détenues par les particuliers

Comme nous l’avons vu, les propriétaires peuvent dans tous les cas, et sans avoir à solliciter d’autorisation, louer leur résidence principale jusqu’à 120 jours par an (voire davantage en présence de circonstances particulières). En revanche, lorsque la réglementation sur les changements d’usage s’applique, une autorisation, qui peut être soumise à compensation, est requise pour louer ne serait-ce qu’une seule nuit un second logement. Cela pénalise grandement les propriétaires de résidences « secondaires ». On interdit à ces propriétaires de rentabiliser un peu leur logement entre deux séjours alors que, par définition, s’agissant d’un « pied-à-terre », on ne peut pas parler de disparition d'un logement locatif disponible à l'année. C'est pour inciter à « repêcher » ces propriétaires que, depuis la loi ALUR, le nouvel article L.631-7-1 A du CCH rappelle expressément que les communes (ou le cas échéant les EPCI) peuvent instaurer un régime d'autorisation temporaire au bénéfice des personnes physiques. En excluant les propriétaires personnes morales, le législateur a souhaité faire le tri entre les particuliers et les investisseurs, « les sociétés qui font profession de loueurs en meublés saisonniers ; mais fallait-il pour autant », comme l’observent des commentateurs, « en exclure les sociétés civiles immobilières à caractère familial ? »[8] Quoi qu’il en soit, la plupart des grandes villes ont voté ce type d'autorisation temporaire, à des conditions différentes cependant. A Lille, l’autorisation est donnée pour une durée de deux ans, renouvelable deux fois, tandis qu’à Aix-en-Provence l’autorisation est valable trois ans, renouvelable cinq fois. Elle est limitée à un seul logement par personne physique ou foyer (Lille, Nice, Nantes), ou deux (Toulouse, Strasbourg) ou cinq logements (Marseille). Paris et Bordeaux semblent être les seules grandes villes à ne pas avoir instauré de régime d’autorisation temporaire. Paris n’aime décidément pas les résidences « secondaires », auxquelles elle applique déjà la surtaxe d’habitation au taux le plus fort. Pourtant, ce n’est pas toujours à des fins de villégiature que des propriétaires possèdent un second logement à Paris.

A défaut de régime d'autorisation temporaire, il existe une solution, qui consiste à louer le logement via un « bail mobilité ». Ce nouveau type de bail, créé par la loi ELAN du 23 novembre 2018, peut être signé pour une durée d’un à dix mois avec un locataire en déplacement pour des raisons professionnelles ou les études. Rappelons en effet que, aux termes de l’article L.631-7 du CCH, il est expressément énoncé que les locations dans le cadre d'un bail mobilité n’impliquent pas de changement d’usage. Même s’il ressort des débats parlementaires relatifs à la loi ALUR que le législateur a surtout entendu, au travers des nouvelles règles, « incriminer » les locations à la nuitée ou la semaine à des touristes[9], il est plus prudent de signer un bail mobilité qu’un bail « saisonnier » avec, par exemple, un travailleur saisonnier[10].

Une règlementation souvent associée à une obligation de télédéclaration

Dans les communes non soumises à réglementation des changements d’usage, tout propriétaire louant un meublé de tourisme doit en principe le déclarer en mairie (art. L.324-1-1, II du Code du tourisme), sous peine d’une amende de 450 € (art. R.324-1-2). Les propriétaires louant leur résidence principale ne sont désormais plus tenus de le faire. L’imprimé cerfa n° 14004*03 peut être utilisé. Certaines communes permettent à leurs administrés de remplir ce document en ligne. Il s’agit d’une commodité mais également, comme l’indique une plateforme utilisée par de nombreuses communes, de permettre aux communes de générer des listes électroniques « pour alimenter la base des déclarants à la taxe de séjour » [11].  On n’est cependant jamais obligé de choisir la voie dématérialisée, l’article D.324-1-1 indiquant que la déclaration peut être faite « par tout moyen permettant d’en obtenir un accusé de réception ». 

En revanche, dans les communes soumises à réglementation des changements d’usage, la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016 permet d’imposer une procédure d’enregistrement

via un « téléservice », un autre moyen de dépôt pouvant n’être utilisé que si la commune le décide (art. L.324-1-1, III C. tourisme). Le télédéclarant obtient un numéro d’enregistrement, qu’il doit alors reporter sur ses offres de location (art. L.324-2 C. tourisme[12]). Les informations demandées pour la télédéclaration sont plus détaillées que dans le cadre de la déclaration classique. Il faut renseigner, lorsque le meublé « fait partie d'un immeuble comportant plusieurs locaux, le bâtiment, l'escalier, l'étage et le numéro d'appartement », ce qui facilitera le travail des enquêteurs en cas de visite sur place. Le propriétaire doit par ailleurs indiquer « son statut de résidence principale ou non » (art. D.324-1-1, II du C. tourisme). Contrairement à l’ancienne déclaration papier, la télédéclaration doit aussi être effectuée par ceux qui louent leur résidence principale. Concernant ces derniers, l’article L.324-1-1 énonce expressément, depuis la loi ELAN du 23 novembre 2018, qu’il leur est interdit de louer leur logement plus de 120 jours par an (sauf circonstances particulières). D’ailleurs, « la commune peut, jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué ». Surtout, depuis la loi Lemaire précitée de 2016, ce dispositif est associé à une obligation pour les plateformes de type « airbnb » de bloquer automatiquement les locations de locaux enregistrés comme résidence principale après 120 jours (voir ci-après). Les sanctions applicables en cas de non télédéclaration sont incomparablement plus dissuasives ; depuis la loi ELAN, une amende civile de 5.000 € est encourue (art. L.324-1-1, V C. tourisme)[13]. Le propriétaire qui ne communiquerait pas le nombre de nuitées de location malgré la demande de la mairie encourt quant à lui une amende de 10.000 €. (à la ligne)

Christian Estrosi, Maire de Nice et Président de la Métropole Nice Côte d’Azur, se félicite auprès de nous d’avoir « été précurseur » en faisant « voter l’instauration dès le 1er juillet 2017 d’une déclaration préalable » avec numéro d’enregistrement. Il entend ainsi réduire « l’impact très négatif d’un développement exponentiel des meublés touristiques au détriment du logement des niçois et de l’activité des hôteliers ». A Toulouse, où « le marché traditionnel du locatif n’est pas impacté par le développement des plateformes », il s’agit surtout de doter la Ville d’un meilleur outil de mesure. Pour Sylvie Rouillon-Valdiguié vice-présidente de Toulouse Métropole en charge du tourisme, « la télédéclaration nous permet de connaître enfin les loueurs. (…) à fin janvier 2019 nous avons environ 1.200 numéros qui ont été délivrés pour 780 propriétaires réguliers. Ce que nous considérons comme un bon retour. Nous pourrons donc croiser le fichier de ces loueurs avec ceux de la taxe de séjour ». Précisons que lorsque la télédéclaration est instituée, il n’est évidemment plus nécessaire de faire une déclaration papier classique.

Un risque d'arbitraire

Certaines villes, comme Sète ou Martigues, instaurent l'obligation de télédéclaration des meublés de tourisme sans préciser le régime des autorisations de changement d'usage. Nous l'avons vu, depuis la loi ELAN, cela entraine automatiquement l'interdiction de louer un logement déclaré comme résidence principale plus de 120 jours par an[14]. Puisque ces communes n'entrent pas dans le champ d'application de plein droit de la règlementation sur les changements d'usage, elles doivent quand même, au préalable, avoir voté l'instauration de cette règlementation sur leur territoire. Mais elles le font via une délibération a minima, qui prévoit l'obligation de recueillir une autorisation sans préciser les conditions auxquelles des autorisations temporaires ou définitives peuvent être accordées. Les propriétaires sont laissés dans le flou le plus total. S’il leur est explicitement interdit de louer leur résidence principale plus de 120 jours par an, qu'en est-il de leur résidence secondaire ? De leur investissement locatif ? Par comparaison, dans les grandes villes de France, les règles de compensation et d’octroi d’autorisations temporaires sont connues et publiées. Cet état de fait est fort regrettable et sans doute contraire à l’article L.631-7-1 du CCH qui impose, lorsque l'encadrement des changements d'usage est applicable, qu'« une délibération du conseil municipal [ou de l'EPCI] fixe les conditions dans lesquelles sont délivrées les autorisations ». Théoriquement, les communes concernées sont donc obligées de rendre publique leur doctrine, ce qui constitue une protection minimum contre le risque d'arbitraire.  

D’autre irrégularités sont constatées. Cannes a par exemple instauré la télédéclaration (avec obligation de mentionner le statut de résidence principale ou « secondaire ») sans même voter, au préalable, l'application de la réglementation sur les changements d'usage[15]. Si, dans un guide édité par la Ville, elle entretient le flou en indiquant qu’« à défaut [de télédéclaration], la déclaration en mairie peut être réalisée au moyen du formulaire papier, téléchargeable sur internet ou récupérable en mairie », elle précise bien que, dans tous les cas, « lorsque le logement constitue la résidence principale du loueur, il ne peut plus faire l’objet d’une offre de location au-delà de 120 jours par an, sous peine de sanctions[16] » . On n’imagine pourtant pas que les propriétaires puissent être sanctionnés sur le fondement d'une délibération aussi manifestement illégale. Mais le fait est que la société Airbnb a intégré Cannes dans sa liste de villes où elle est compte appliquer le blocage au-delà de 120 jours de location. Les propriétaires concernés devront batailler ferme avec le service client de la plateforme pour obtenir gain de cause. Pire encore, Nîmes, qui n’est même pas en zone « tendue », fait aussi partie des dix-huit villes « taguées » par Airbnb pour appliquer le blocage. Comme Cannes, la Ville a peut-être pensé qu’entre un formulaire à remplir en ligne et la télédéclaration il n’y avait qu’un pas[17]. Les informations qui peuvent être demandées dans l’un ou l’autre cas sont pourtant différentes. En cas de simple déclaration, il n’est pas question de renseigner par exemple le statut de résidence principale ou « secondaire ». On constate enfin une tendance à confondre la déclaration (ou la télédéclaration des meublés) avec la déclaration à remplir en vue de la taxe de séjour. Alors qu’elle n’a formellement institué aucune procédure de télédéclaration, Biarritz impose par exemple de reporter toutes informations requises dans ce dernier cadre (en particulier le statut de résidence principale) dans un formulaire intitulé « taxe de séjour », le tout sous la menace de « sanctions pénales »[18]

Le cas des chambres chez l'habitant

Le régime des locations de chambres chez l'habitant louées plus de 120 jours par an pose difficulté. Seules Lille et Strasbourg indiquent explicitement qu'elles peuvent bénéficier d'une autorisation personnelle illimitée. On peut en effet, comme Strasbourg, justifier cela par le fait qu'elles impliquent seulement la transformation d'un local d'habitation en local à usage mixte, changement d'usage généralement autorisé par les villes. Toutefois, en matière d’obligation de déclaration, et depuis la loi ELAN du 23 novembre 2018, le législateur définit les meublés de tourisme comme des logements « à l'usage exclusif du locataire » (art. L.324-1-1 C.tourisme). Une ville comme Lille ne devrait donc pas pouvoir continuer à soumettre les chambres chez l'habitant à l’obligation de déclaration ou télédéclaration, avec toutes les conséquences qui s'en suivent. Cependant, l’article L.631-7 du CCH ne fait, lui, aucune référence à l’exclusivité du logement. Les propriétaires louant une chambre plus de 120 jours devraient donc être tenus de solliciter une autorisation de changement d’usage, sans avoir à faire de déclaration ou de télédéclaration au titre du Code du tourisme… Précisons que, dans tous les cas, les chambres d'hôtes[19] ne sont pas concernées par l’obligation de télédéclaration. Elles font, selon l'article L.324-4 du Code du tourisme, l’objet d’une déclaration papier spécifique (on peut utiliser le cerfa n°13566*02).

2,1 millions d’euros d’amendes prononcées en 2018

Les sanctions en cas de non-respect des règles relatives aux changements d’usage ont été doublées par la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle du 18 novembre 2016. Une amende civile de « 50.000 € par local irrégulièrement transformé » est encourue ! Depuis cette même loi, l’« amende est prononcée par le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, sur requête de la commune [et non plus du procureur] dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l'Agence nationale de l'habitat et sur conclusions du procureur de la République, partie jointe avisée de la procédure » (art. L.651-2 du CCH). Depuis la loi ALUR de 2014, ce n’est plus l’Anah mais la commune victime qui se voit versée l’amende prononcée. Enfin, le président du TGI « ordonne le retour à l'usage d'habitation du local transformé sans autorisation, dans un délai qu'il fixe. A l'expiration de celui-ci, il prononce une astreinte d'un montant maximal de 1 000 € par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé ». Théoriquement, des sanctions pénales sont également encourues. L’auteur de manœuvres frauduleuses positives « est passible d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 80 000 euros » (article L.651-3 du CCH).

La Ville de Paris mobilise chaque année davantage cet arsenal répressif. Alors que le montant cumulé des amendes prononcées avait atteint environ 200.000 € en 2016 et plus d’1,3 million en 2017, la Ville a annoncé avoir obtenu 118 condamnations et plus de 2,1 millions d’amendes en 2018[20]. La Cour de cassation a précisé que sont également condamnables les propriétaires louant à une société « avec autorisation expresse donnée au locataire de sous-louer de manière temporaire le logement »[21]. D'après une décision de la Cour d’appel de Paris en date du 25 octobre 2018, l’« amende doit être fixée en fonction de l’objectif d’intérêt général poursuivi par la législation dont elle vise à garantir le respect dans une ville comme Paris où il existe une grande disparité entre l’offre et la demande de logements à la location, soit la préservation du nombre de logements destinés à l’habitation, des revenus procurés par les locations illicites et de la bonne foi dont l’intéressé a fait preuve ». En l’espèce, le propriétaire, qui louait illégalement un meublé proche de la Tour Eiffel, avait été condamné en première instance à une amende de 2.000 €, outre les dépens et les frais d’avocat de la partie adverse. La Ville de Paris a fait appel. La Cour a accepté de relever l’amende à 12.000 € mais sans aller jusqu’aux 50.000 € réclamés. Elle note en effet que le propriétaire avait transmis à la Ville et sur sa demande un décompte de revenus établi par le site Airbnb. Il avait par ailleurs régulièrement déclaré ses revenus de location meublée au fisc. Enfin, elle note qu’il n’était plus propriétaire du bien litigieux à la date de son assignation par la Ville et qu’il « souffre d’une maladie invalidante qui l’empêche d’exercer une activité professionnelle » [22].

On le voit, un propriétaire pris la main dans le sac à intérêt à collaborer avec les services de la ville. Néanmoins, c’est sur la Ville poursuivante que pèse la charge de la preuve. C’est à elle de démontrer l’usage initial du local considéré, son utilisation comme résidence secondaire (le cas échéant), et le fait qu’il soit loué de façon récurrente en meublé touristique. Dans une décision du 21 janvier 2016, le président du TGI de Paris a par exemple débouté la Ville en fustigeant une « enquête de piètre qualité (…) qui se limite à rassembler le témoignage de Mme B à tout le moins suspect de partialité au vu des indications étayées des défendeurs sur leur contentieux de voisinage, et deux déclarations anonymes et donc invérifiables »[23]. De même, il ne suffit pas d’invoquer la publication d’annonces sur une plateforme, le logement en cause pouvant ne pas avoir été effectivement loué et, qui plus est, de manière récurrente (rappelons en effet que le changement d’usage suppose la location meublée « de manière répétée », art. L.631-7 du CCH). Par comparaison, dans la décision précitée du 25 octobre 2018, la Cour d’appel avait noté que « le bien était proposé pour ce type d’usage sur le site Airbnb et qu’il avait donné lieu à 89 commentaires de personnes l’ayant occupé ». Dans ces conditions, les agents assermentés du service municipal ou départemental du logement ne se priveront pas d’user de leur droit de « visiter les locaux à usage d'habitation » pour enrichir leur dossier, les occupants étant « tenu[s]de laisser visiter sur présentation de l'ordre de mission » (art. L.651-6 du CCH). Depuis la loi ELAN du 23 novembre 2018, ils peuvent enquêter sur les infractions aussi bien à la réglementation des changements qu’au Code du tourisme (obligation de déclaration ou télédéclaration, interdiction de louer un logement déclaré comme résidence principale plus de 120 jours par an, etc.). Cependant, la Cour de cassation vient de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité sur le pouvoir étendu des agents assermentés.

Seule la ville de Paris parait avoir engagé, à ce jour, un contentieux de masse contre les propriétaires en situation irrégulière. Cependant, d’autres villes du territoire semblent en passe d’engager elles-aussi des poursuites. A Bordeaux, après l’année accordée aux propriétaires pour prendre connaissance de la nouvelle règlementation, des dossiers sont déjà « chez l’avocat ». L’Eurométropole de Strasbourg nous indique que les « les premiers procès-verbaux d’infraction ont été transmis » pour traitement judiciaire. A l’inverse, selon Sylvie Rouillon-Valdiguié vice-présidente de Toulouse Métropole en charge du tourisme, la Métropole n’envisage pas d’appliquer la règlementation des changements d’usage « sur un mode répressif. En aucun cas, nous créerons comme à Paris une brigade d’inspecteurs sur la location saisonnière, nous n’en aurons pas les moyens et ce n’est pas dans notre état d’esprit. Nous pourrions toutefois réagir en cas de plainte des hôteliers ou de troubles de voisinage dénoncés par des particuliers » … Il est certain que la lutte contre les meublés illégaux exige de mobiliser des moyens financiers et humains. Si la capitale peut s’appuyer sur le travail d’enquête d’une trentaine d’agents, à Strasbourg, « deux agents assermentés remplissent la mission d’instructeur-contrôleur des changements d’usage ». Compte-tenu du montant des amendes encourues, les villes pourraient néanmoins être tentées d’investir dans un secteur porteur…

Les plateformes de mise en relation sommées d’intervenir

Dès 2014, un nouvel article L.324-2-1 du Code du tourisme créé par la loi ALUR prévoit que tout intermédiaire, en particulier tout exploitant de plateforme numérique, « informe le loueur des obligations de déclaration ou d'autorisation préalables (…) et obtient de lui, préalablement à la location du bien, une déclaration sur l'honneur attestant du respect de ces obligations ». La loi pour une République numérique de 2016 impose aux intermédiaires de réclamer aux utilisateurs leur numéro d’enregistrement (lorsque la commune a instauré la télédéclaration des meublés de tourisme) et de le reporter sur les annonces. Surtout, elle instaure une obligation de blocage des locations : « au-delà de cent vingt jours de location, le logement [déclaré comme résidence principale] ne peut plus faire l'objet d'une offre de location par son intermédiaire jusqu'à la fin de l'année en cours ». Enfin, ils doivent, sur demande des communes, fournir un décompte des nuitées louées. La loi ELAN du 23 novembre 2018 institue des sanctions lourdes. Les communes concernées peuvent réclamer une amende civile de « 12.500 € par meublé de tourisme objet du manquement » en cas de publication d’une annonce sans numéro d’enregistrement (territoires où le numéro d’enregistrement est requis). Une amende de 50.000 € par meublé de tourisme objet du manquement est encourue en cas de non-respect de l’obligation de blocage.

Dès la fin 2017, la Ville de Paris a assigné les plateformes Airbnb et Windu sur le fondement de ces nouveaux textes. Elle leur reproche de maintenir en ligne de nombreuses annonces sans numéro d’enregistrement. La Cour de cassation vient de refuser de renvoyer au Conseil constitutionnel la QPC soulevée par les défenderesses. Ces dernières invoquaient une rupture d’égalité devant les charges publiques[24], du fait que les nombreuses obligations imposées par le Code du tourisme entraînaient un surcoût et que la loi n’avait prévu aucune indemnisation. Pour les juges insulaires, la question « ne présente pas un caractère sérieux dès lors » qu’elles « sont justifiées par un motif d’intérêt général, la lutte contre la pénurie de logements destinés à la location et la régulation des dysfonctionnements du marché, qu’elles s’imposent à toute personne qui se livre ou prête son concours contre rémunération » (agents, négociateurs, exploitants de plateformes numériques) à la location d’un meublé de tourisme[25]. Le procès peut donc reprendre devant le TGI. En mai 2018, l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances, qui regroupe de grandes enseignes du secteur (Abritel-HomeAway, Airbnb, Clévacances, Homelidays, Tripadvisor, etc.) a signé avec le secrétaire d’Etat à la cohésion des territoires un protocole par lequel les plateformes s'engageaient notamment à appliquer le blocage des locations de résidences déclarées comme principales après 120 jours. Sur son portail, Airbnb indique ainsi appliquer dès le 1er janvier 2019 le blocage dans 18 villes soumises à télédéclaration, dont Paris. Au début de l’année, la société a annoncé également avoir collecté presque 24 millions d’euros de taxe de séjour pour le compte de 23 000 communes françaises, dont 7,5 millions uniquement pour Paris[26]. En effet, la loi de finances rectificative pour 2017 impose désormais que les plateformes – intermédiaires de paiement collectent la taxe de séjour pour le compte des villes[27]. La mairie de Paris a malgré tout assigné une seconde fois la plateforme californienne[28]. Ses agents ont instruit 1.000 dossiers relatifs à un échantillon d’annonces sans numéro d’enregistrement pour des logements à fort taux d’occupation en secteur sensible. La Ville réclame cette fois une amende record de 12,5 millions d’euros au vu des nouvelles sanctions introduites par la loi ELAN.

D’après une décision intéressante du TGI de Paris du 6 février 2018, les plateformes qui n’appliquent pas les textes peuvent également voir leur responsabilité engagée par…des propriétaires. Le tribunal a ainsi condamné la société Airbnb à payer plus