La réforme ajoute un nouveau risque à prendre en compte et avance le moment où l’information doit être délivrée par le vendeur ou le propriétaire bailleur.
Concernant les immeubles ou baux concernés, la réforme n’opère aucun changement de fond.
S’agissant des ventes immobilières (quel que soit l’immeuble en cause, qu’il s’agisse par exemple d’un bâtiment ou d’un terrain), l’état des risques doit systématiquement être annexé à la promesse de vente (lorsqu’une promesse est signée) et à l'acte authentique de vente (même lorsqu’il a déjà été annexé à une promesse).
S’agissant des locations, formellement, le Code de l’environnement ne fait de l’état des risques une annexe obligatoire que pour les baux d’habitation et les baux commerciaux. Cependant, l’article L.125-5 du Code de l’environnement débute en posant le principe que tous les « les acquéreurs ou locataires de biens immobiliers » doivent être informés des risques via un état des risques.
▶ Quel que soit le bail en cause, qu’il porte sur un bien bâti ou non, à usage de logement ou non, il est conseillé de faire signer un récépissé de remise de l’état des risques ou d’annexer l’état des risques au bail.
Concernant les secteurs concernés, un état des risques n’est en théorie obligatoire que lorsque l’immeuble considéré est situé dans une des zones à risque listées à l’article R.125-23 du Code de l’environnement. Cependant, la liste des risques pris en compte dans l’état des risques n’a cessé de s’allonger au fil des ans. En dernier lieu, le Code de l’environnement imposait l’établissement d’un tel document dès lors que le bien loué était situé dans le champ d’un plan de prévention des risques technologiques, naturels ou miniers approuvé ou prescrit ou dont certaines dispositions avaient été rendues immédiatement opposables, dans une zone de sismicité 2 à 5, ou dans une zone à potentiel radon de niveau 3.
A cette liste de risques la loi Climat et résilience du 22 août 2021 a ajouté le risque lié au recul du trait de côte (érosion côtière).
▶ En pratique, compte tenu de la multiplicité des risques listés, la tendance est à établir systématiquement un état des risques pour tout bien, quitte à ce que, le cas échéant, cet état des risques ne fasse mention d’aucun risque répertorié.
Conformément à la loi Climat et résilience, c’est désormais dès le stade des annonces que l’état des risques est requis.
Ainsi, « l’annonce relative à la vente ou la location d'un bien pour lequel doit être établi l'état des risques mentionné à l'article L. 125-5, quel que soit son support de diffusion, comporte la mention suivante : “ Les informations sur les risques auxquels ce bien est exposé sont disponibles sur le site Géorisques : www.georisques.gouv.fr » (article R.125-25 du Code de l’environnement, modifié par le décret du 1er octobre 2022).
S’il ne s’agit que de renvoyer vers Géorisques au stade de l’annonce, c’est un état des risques en bonne et due forme qui doit pouvoir être « remis » à tout potentiel acquéreur ou locataire dès la première visite des lieux (même article), ce document devant être « établi depuis moins de six mois ».
Un délai plus ou moins long étant susceptible de s’écouler entre la visite des lieux et la signature du contrat, le Code de l’environnement prend désormais soin de préciser que l’état des risques doit être « actualisé par le promettant, le réservant, le vendeur ou le bailleur, selon le cas, si les informations qu'il contient ne sont plus exactes à la date de signature de la promesse de vente, du contrat préliminaire en cas de vente en l'état futur d'achèvement, de l'acte authentique ou du contrat de bail, auquel il doit être annexé ».
A noter : si on lit le Code de l’environnement, l’état des risques annexé par exemple à un contrat de location peut dater de plus de six mois dès lors que, lors de la visite, le document remis au candidat locataire datait de moins de six mois. Les bailleurs – ou leurs mandataires – seront évidemment bien avisés de faire signer une attestation de remise lors de la visite. Pour sûr, en cas de visites multiples, tout ceci ne va pas dans le sens d’un allègement de la « paperasse ».
La réforme ne modifie pas la sanction de base prévue pour le défaut d’état des risques au moment de la signature du contrat : « l'acquéreur ou le locataire peut poursuivre la résolution du contrat ou demander au juge une diminution du prix » (article L.125-5 du Code de l’environnement).
En revanche, en matière de vente de logements, la réforme suspend désormais le délai de réflexion de 10 jours tant que l’état des risques n’est pas remis. Ainsi, lorsque l'état des risques n'est pas remis à l'acquéreur au moment de la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l’acte authentique de vente, le délai de rétractation « ne court qu'à compter du lendemain de la communication de ce document à l'acquéreur » (même article).
Ne pas établir un état des risques fait donc courir un risque grave, même si, concernant par exemple le risque de résolution du contrat aux torts du bailleur ou du vendeur, les cours d’appel s’écharpent sur la question de savoir s’il faut ou non caractériser un préjudice du locataire ou de l’acquéreur pour prononcer la résolution[1].
A noter : l’article L.125-5 n’envisage expressément de sanction qu’en cas de défaut d’état des risques ou d’information relative à l’existence d’un sinistre ayant donné lieu à indemnité d’assurance après une catastrophe naturelle (information devant figurer dans l’état des risques). Le défaut de remise d’un état des risques lors de la visite des lieux ou de renvoi vers Géorisques dans les annonces ne sont pas non plus visés. Bailleurs et vendeurs ne doivent pas pour autant se sentir libres de diffuser des annonces non conformes ou de remettre des états des risques incomplets…
Quid du risque lié à la pollution des sols ?
Depuis 2010, le vendeur ou le bailleur d’un terrain pour lequel un risque de pollution des sols est identifié doit en informer l’acquéreur ou le locataire.
Bien que cette obligation soit traitée à part dans le Code de l’environnement, le risque lié à la pollution des sols est intégré dans le dernier modèle d’état des risques de 2018. Ce dernier est même intitulé « Etat des risques et pollutions ». Cependant, depuis la réforme, « l’information des acquéreurs et locataires sur les risques » et « l’information des acquéreurs et locataires sur la pollution des sols » sont traitées dans deux sous-sections bien distinctes de la partie réglementaire du Code de l’environnement. Par ailleurs, le défaut d’information sur les sols pollués (lorsque le terrain est situé dans un « secteur d’information sur les sols ») entraîne une sanction propre. Ainsi, la résolution du contrat, la diminution du prix, voire la réhabilitation du terrain ne peut être demandée qu’en cas de découverte de pollution sévère (article L.125-7 du Code de l’environnement).
Certains commentateurs[2] en concluent donc que l’information sur les sols pollués (lorsque le terrain considéré est situé dans un « secteur d’information sur les sols ») doit dorénavant être délivrée dans un document différent de l’état des risques.
A noter : l’état des risques téléchargeable sur Géorisques (voir ci-après) continue d’intégrer le risque lié à la pollution des sols.
La loi Climat et résilience comme le décret du 1er octobre dernier ont fixé la date d’entrée en vigueur de la réforme de l’état des risques au 1er janvier 2023.
Pourtant, tous les portails officiels continuent de renvoyer vers le modèle d’état des risques publié par un arrêté du ministre de la Transition écologique du 13 juillet 2018. Ce modèle n’est plus conforme aux nouvelles règles. Notamment, il ne prend pas en compte le risque lié au recul du trait de côte. La fiche dédiée du portail « service-public.fr » en est encore à annoncer la parution d’un décret devant préciser les nouvelles règles de l’état des risques (Diagnostic immobilier : état des risques et pollutions | Service-public.fr).
De même, l’état des risques prérempli qu’il est possible de télécharger sur la plateforme « Géorisques » (voir ci-après) n’a pas encore été mis à jour. Enfin, les cartographies nécessaires à l’établissement de l’état des risques semblent pour partie encore introuvables. Notamment, l’article R.125-23 du Code de l’environnement indique que les zones exposées au recul du trait de côte sont « consultables » sur le portail national de l’urbanisme. A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous n’avons pas trouvé l’information désirée (pire : lors d’une nouvelle tentative, ce portail était inaccessible).
Il est fort regrettable que les pouvoirs publics imposent une entrée en vigueur au 1er janvier 2023 alors que les outils pour remplir l’état des risques n’ont pas encore été mis à jour.
Dans ce contexte, quelle façon d’établir l’état des risques est à privilégier ?
On peut concevoir trois façons de procéder.
Une première façon d’établir l’état des risques consiste à remplir le modèle d’état des risques arrêté par le ministère de la Transition écologique (ce document est facilement accessible après avoir tapé « modèle état des risques » sur n’importe quel moteur de recherche internet).
Mais, de notre point de vue, cette façon de faire doit désormais être déconseillée. D’une part, comme nous l’avons souligné, le modèle actuel date de 2018 et n’est plus conforme à la règlementation. D’autre part, il n’est pas toujours facile d’accéder aux informations nécessaires pour remplir ce formulaire. Certes, le Code de l’environnement précisait jusqu’ici qu’un arrêté du préfet du département devait récapituler les risques répertoriés pour chaque commune. Mais les portails internet de chaque préfecture sont différents et parfois obscurs (il faut en général chercher la rubrique « IAL », pour information des acquéreurs et locataires)[3]. Compte tenu du fait qu’il y a sept types de risques à prendre en compte, le risque d’erreur est notable. Enfin, dans sa dernière version, le Code de l’environnement ne prévoit plus expressément que le préfet doive prendre des arrêtés récapitulatifs des risques…
A noter : d’un certain côté, la logique invite à penser qu’on ne peut se voir reprocher d’utiliser le modèle obsolète de 2018 tant qu’un nouveau modèle n’a pas été publié. D’un autre côté, à la différence de l’ancien article R.125-26 du Code de l’environnement, le nouvel article R.125-24 du Code de l’environnement ne précise plus que l’état des risques doive être conforme à un modèle établi par arrêté ministériel. En réalité, il n’est donc pas acquis du tout qu’un nouveau modèle soit publié, l’état des risques n’obéissant à aucune forme particulière mais devant simplement renseigner toutes les informations requises à l’article R.125-24. Autrement dit, il est théoriquement possible de porter toutes les informations requises par cet article « sur papier libre »…
Depuis plusieurs années, le ministère de la Transition écologique a mis en place la plateforme en ligne « Géorisques », qui permet, à partir d’une adresse ou d’un numéro de parcelle, de télécharger un état des risques prérempli (https://errial.georisques.gouv.fr/). Cette procédure permet d’obtenir un document récapitulant automatiquement les risques répertoriés pour une parcelle donnée.
Les autorités poussent clairement le public à se saisir de ce nouvel outil. S’ils fournissent des informations pour remplir le modèle papier, les portails des préfectures (section IAL) font généralement la promotion de Géorisques. De même, la dernière version du Code de l’environnement multiplie les références à Géorisques (voir l’article R.125-24 du Code de l’environnement).
Télécharger sur Géorisques un document prérempli représente un gain certain de temps et limite le risque d’erreurs.
Cependant, ce document comporte encore de sérieux inconvénients :
Important : dans tous les cas, l’état des risques téléchargé sur Géorisques impose un minimum de recherches personnelles pour le bien considéré. Conformément au Code de l’environnement, le vendeur ou le propriétaire bailleur doit notamment préciser si le bien en cause a fait l’objet d’une indemnisation après un arrêté de catastrophe naturelle.
En définitive, compte tenu de l’absence de mise à jour du modèle officiel d’état des risques ou de Géorisques, mais aussi du fait que l’établissement d’un état des risques est devenu un acte compliqué à établir, un propriétaire prudent aura intérêt à faire appel à un diagnostiqueur. Même s’il n’est pas dit que l’état des risques établi par un professionnel sera conforme en tous points à la réglementation (celle-ci est très technique et change régulièrement), le propriétaire bailleur ou vendeur aura au moins quelqu’un contre qui se retourner en cas de litige avec le locataire ou l’acquéreur.
A la limite, si l’on tient à éviter des frais de diagnostic supplémentaires, on ne se résoudra à établir un état des risques soi-même que si le document téléchargé sur Géorisques conclut à l’absence du moindre risque pour le bien considéré.
A noter : comme nous l’avons vu, la plateforme Géorisques ne renseigne pas encore sur le risque lié au recul du trait de côte.
Si l’on ne fait pas appel à un professionnel et que l’on souhaite déterminer si un bien en particulier est potentiellement concerné par le risque lié au recul du trait de côte, on peut consulter le décret n° 2022-750 du 29 avril 2022 établissant la liste des communes dont l'action en matière d'urbanisme et la politique d'aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l'érosion du littoral. Si le bien en cause est situé dans une des communes concernées, il est possible qu’il soit concerné par le risque lié à l’érosion côtière.
De manière générale, l’UNPI milite pour une simplification des formalités préalables aux ventes et locations immobilières. Compte tenu des énormes défis que doivent relever les propriétaires (rénovation énergétique, mise sur le marché de logements en parfait état et à loyer abordable), il est impensable de perdre du temps à établir des annexes avec des outils non mis à jour.
Concernant l’état des risques, le développement de la plateforme Géorisques est assurément une bonne solution.
Mais il est urgent :
L’UNPI a déjà alerté le service en charge de la plateforme Géorisques sur les difficultés rencontrées. Vous pouvez compter sur votre fédération pour continuer d’alerter les autorités sur ce sujet.
[1] Loyers et Copropriété n° 4, Avril 2022, comm. 59
[2] Voir Dictionnaire permanent Gestion immobilière, bulletin 560, octobre 2022
[3] La recherche « état des risques + nom de commune » donne aussi de bons résultats
Source : 25 millions de propriétaires et vous • N°571; mars 2023
Restait à déterminer la liste des communes concernées, à savoir celles « situées à moins de soixante minutes par véhicule automobile d’une gare desservie par la future ligne à grande vitesse » (article 1609 H du CGI). La liste des 2340 concernées vient d’être dressée par un arrêté du 31 décembre 2022, publié au JO du 1er janvier 2023. Cette nouvelle taxe apparaîtra dès 2023 dans tous les avis de taxe foncière (propriétés bâties et non bâties), de cotisation foncière des entreprises et de taxe d’habitation sur les résidences secondaires dressés pour les biens situés dans ces communes. Dans nombre de cas, elle viendra s’ajouter à une taxe spéciale d’équipement déjà prélevé au profit d’un établissement public foncier (un classique désormais), voire à une taxe gemapi-inondations, entre autres taxes additionnelles aux impôts locaux. Les promoteurs de cette nouvelle taxe « LGV » font valoir un surcoût d’à peine 1 € à 3 € par avis d’imposition. Mais l’augmentation du montant à prélever moins d’un an après la création de cette TSE est de mauvais augure. Ainsi, avec la loi de finances pour 2023, le produit à répartir entre les contribuables vient de passer de 24 millions d’euros par an à 29,5 millions d’euros par an. De plus, ce montant sera désormais indexé sur l’inflation. Pour couronner le tout, la loi de finances pour 2023 double cette TSE spéciale d’une « taxe spéciale complémentaire » (nouvel article 1609 I du CGI). Cette fois, ce sont uniquement les redevables de la CFE qui devront financer 21,5 autres millions d’euros par an, ce montant étant lui aussi indexé sur l’inflation (toujours dans 2340 communes du Sud-Ouest). À ce prix-là, on peut espérer que la LGV soit sur de bons rails.
A l’heure où nous écrivons ces pages, la proposition de loi Kasbarian est en passe d’être débattue au Sénat. Après avoir été auditionnés à l’Assemblée Nationale, où elle a été adoptée en première lecture. Nous avons réalisé plusieurs contributions écrites pour les députés, leur permettant ainsi de défendre notre position au sein de l’hémicycle. Plusieurs amendements rédigés par nos soins ont également été adoptés.
Nous dénonçons depuis toujours les délais anormalement longs pour obtenir l’expulsion d’un locataire qui ne paye plus son loyer. Cette adoption en première lecture est donc une victoire !
Nous avons lancé une quinzaine de procédures judiciaires contre des arrêtés préfectoraux fixant des plafonds de loyer ou des décrets étendant l’encadrement des loyers à certaines communes.
Par un jugement du 8 juillet 2022, le Tribunal administratif de Paris a annulé l’arrêté fixant les loyers de référence pour Paris du 28 mai 2019 et qui s’imposait à tous les baux signés entre le 1er juillet 2019 et le 30 juin 2020. Un appel est cependant en cours et d’autres décisions sont attendues dans les mois à venir. Elles ne manqueront pas d’être analysées et commentées dans ce journal.
Nous avons milité et défendu les intérêts des propriétaires durant toute l’année 2022 pour éviter que le gel total des loyers d’habitation et commerciaux soit adopté.
Nous avons dénoncé dès 2022 l’instauration d’un audit énergétique pour les maisons individuelles classés F et G alors même qu’il manque d’auditeurs. Plusieurs reports successifs ont décalé l’entrée en vigueur de l’audit au 1er avril 2023.
Nous avons dénoncé haut et fort un report sur les propriétaires des anciennes parts de taxe d’habitation au profit des syndicats de communes ou des taxes Gemapi-inondations adossées à la taxe d’habitation. A la suite d’une décision du Conseil constitutionnel, la loi de finances rectificative du 16 août 2022 a corrigé le système de compensation de la suppression de la taxe d’habitation au profit des collectivités.
En réponse à notre demande, la loi de finances 2022 a prévu qu’en cas de relocation après la fin d’une convention ANAH, le loyer puisse librement être remis au niveau du marché (non-application du blocage des loyers de relocation en « zone tendue »).
Source : 25 millions de propriétaires et vous • N°570 février 2023
]]>Rendez-vous compte : au 1er janvier 2025, 203 2 000 logements occupés à titre de résidences principales (que vous soyez propriétaire occupant ou bailleur) vont être déclassés et sortir du marché (pour le locatif). Car nombre de propriétaires dont vous peut-être faites partie n’ont ni les moyens des travaux, ni les moyens de les organiser par manque de matériaux (la Chine et les USA ayant fait main basse sur les stocks) et de main d’oeuvre qualifiée ; ou bien encore parce que leur bien est en copropriété.
Et c’est sans compter sur des situations ubuesques non anticipées par le gouvernement : perte économique le temps des travaux, les chambres de bonnes qui du fait de l’isolation par l’intérieur passeront sous le seuil de 9m2 et deviendront inlouables, les communes qui refusent l’isolation par l’extérieur, etc. Pire encore, au 1er janvier 2028, 3 154 000 logements supplémentaires seront impactés, et 6 586 000 de plus encore entre 2028 et 2035 !
Que vous soyez propriétaire ou bien bailleur, vous êtes concerné. C’est pour toutes ces raisons que l’UNPI, l’association qui défend les propriétaires immobiliers, a décidé de lancer un grand appel à mobilisation en France.
Notre projet ? Demander à la Première Ministre Madame Elisabeth Borne que les travaux de rénovation énergétique engagés par les propriétaires soient intégralement déductibles fiscalement. Alors, si vous ne souhaitez pas que vos biens immobiliers soient déclassés et vous retrouver devoir à payer seul la facture, signez notre pétition nationale !
Explications sur le DPE : La loi Climat et Résilience impose un nouveau type de diagnostic : le DPE (Diagnostic de Performance Énergétique). Or, ce DPE tient compte désormais du niveau de CO2 dégagé par vos biens immobiliers : niveau d’isolation de votre logement, mais aussi le système de chauffage… Exit les chaudières au fioul et au gaz, faute de déclassement. L’État privilégie les pompes à chaleur pour les maisons et les immeubles en chauffage collectif, et l’électrique pour les appartements au chauffage individuel. De quoi se poser des questions, à l’heure où la France n’est plus capable de fournir sa propre électricité, qu’elle facture par ailleurs à prix d’or. Si vous n’engagez pas ces travaux, l’État considèrera que votre bien immobilier dégage trop de CO2 et il sera qualifié « d’indécent », et donc déclassé.
Dans les deux cas, vous êtes perdant ! Et ceci d’autant plus que les aides à la rénovation proposées par le gouvernement concernent peu de propriétaires. Aussi, elles ne comblent pas la hausse des prix des matériaux (inflation), ni la hausse généralisée de la taxe foncière sur le territoire national. Les propriétaires se retrouvent acculés, sans solution raisonnable et immédiate. La situation est d’autant plus inquiétante qu’à partir de 2028, les banques ne prêteraient plus à de futurs acquéreurs pour les ventes d’un bien classé en F ou G, sauf si elles sont accompagnées d’un plan de rénovation chiffré, qui naturellement jouera à la baisse sur le prix de vente. Il est donc urgent que l’État prenne sa part de responsabilité, en simplifiant et généralisant les aides à la rénovation énergétique pour TOUS les propriétaires. Votre patrimoine immobilier est en jeu. La rénovation oui, mais pas au prix du sang des propriétaires !
Mobilisez-vous avec nous : signez la pétition en ligne !
Christophe Demerson
Président de l’UNPI – l’Association nationale qui défend les propriétaires immobiliers
Pour soutenir notre action en faisant un don à l'UNPI, cliquez ici
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Si vous êtes propriétaire d’une maison ou d’un appartement, il est essentiel de mettre votre bien à l’abri d’un grand nombre de risques. Pourtant d’un point de vue strictement législatif, l’assurance habitation n’est pas obligatoire pour les propriétaires de maisons individuelles. Elle évite pourtant d’assumer la responsabilité financière en cas de dommages matériels et de dégâts causés à autrui, qui peuvent vite vous mettre sur la paille ! Les garanties de base d’une assurance habitation couvrent les sinistres liés aux explosions, incendies, vols avec effraction ou avec violence, catastrophes naturelles et technologiques, tempêtes-grêle-neige, bris de glace, dégâts des eaux, actes de terrorisme ou attentats et ceux attachés à votre responsabilité civile (pour vous en tant que propriétaire, votre conjoint(e) et toute personne à votre charge, animaux compris).
Si vous êtes copropriétaire d’un appartement ou d’une maison située dans un lotissement en copropriété, que vous soyez occupant ou non, la loi Alur du 24 mars 2014 vous impose de souscrire au minimum une assurance responsabilité civile pour votre logement, de manière à couvrir les dommages occasionnés aux tiers. Elle intervient en complément de l’assurance collective de la copropriété, obligatoire pour les syndics, qui couvre les parties communes.
France Assureurs précise les différents termes de l’obligation d’une assurance responsabilité civile pour les propriétaires occupants et non-occupants : « Tout copropriétaire occupant doit être assuré à titre personnel pour garantir sa responsabilité envers les voisins, les tiers, la copropriété et envers d’éventuels locataires. S’il n’occupe pas le logement, un copropriétaire doit s’assurer contre les risques pour lesquels sa responsabilité envers ses locataires est susceptible d’être engagée, en cas de vice de construction, de défaut d’entretien ou de trouble de jouissance ».
Si vous êtes copropriétaire d’un appartement ou d’une maison située dans un lotissement en copropriété, que vous soyez occupant ou non, la loi Alur du 24 mars 2014 vous impose de souscrire au minimum une assurance responsabilité civile pour votre logement.
Telle qu’elle est définie par la loi, la garantie responsabilité civile implique l’obligation de réparer tout dommage causé à autrui. La somme à payer n’est pas liée à la gravité de la faute ou à l’imprudence commise, mais en fonction de l’importance des dommages et personne n’est à l’abri ! Ce montant est généralement limité pour les dommages matériels mais illimité pour les dommages corporels.
La responsabilité civile est incluse d’emblée dans les contrats multirisque habitation pour une résidence principale, l’assureur se substituant au responsable pour indemniser la victime. Cette garantie responsabilité civile peut couvrir également certaines garanties contractuelles : les assistantes maternelles, les personnes accueillant à domicile des personnes âgées ou handicapées adultes, les activités exercées à titre bénévole dans le cadre d’une association sans but lucratif ou encore des chambres d’hôtes… En revanche, elle exclut généralement toute activité professionnelle rémunérée ou non, les fonctions publiques et syndicales représentatives mais aussi, par exemple, la détention de chiens catégorisés et dangereux. Avant de signer le contrat, il convient de vérifier certains points, notamment les personnes du foyer garanties, l’absence ou la présence de franchises, les limites des garanties prévues (exclusions, plafonds…). Il est toujours possible de demander à votre assureur l’adaptation ou une extension de la garantie pour vos besoins spécifiques.
Si vous êtes propriétaire bailleur, l’assurance PNO (ou assurance pour propriétaire non-occupant) n’est obligatoire que si votre bien se situe dans une copropriété. Cependant elle est largement conseillée pour les propriétaires bailleurs d’une maison individuelle car elle permet de ne pas vous reposer uniquement sur le contrat d’assurance de vos locataires, notamment si ceux-ci disposent d’une assurance dont la couverture n’est pas suffisante. Ce peut être le cas pour l’éclatement d’une canalisation dû au gel par exemple. L’assurance PNO est aussi utile dans le cadre d’un vice de construction quand la présomption de responsabilité du locataire n’entre pas en jeu. Elle protège également en cas de sinistre si le logement est vacant ou occupé à titre gratuit. Cette assurance PNO propose en réalité une couverture identique à une multirisque habitation. En y ajoutant les garanties « recours de locataires » et « recours des voisins et des tiers », elle protège votre bien contre les risques de dégradations commises par le locataire, garantit votre responsabilité envers votre locataire, les voisins et les tierces personnes en cas de sinistre et peut même vous couvrir face aux impayés de loyer, à condition d’avoir souscrit l’option « garantie loyers impayés ».
Si vous venez de vous porter acquéreur d’un bien, vérifiez si celui-ci reste assuré au jour du transfert de propriété. Si c’est le cas, il est possible de poursuivre le contrat souscrit par le vendeur ou de le résilier en adressant une lettre à l’assureur du vendeur ou encore de prendre une nouvelle assurance si le bien n’est pas assuré. Si vous faites réaliser des travaux dans votre maison par une entreprise, vous devez obligatoirement souscrire une assurance construction dommages ouvrage. En cas de sinistre, cette garantie vous permet d’être indemnisé des travaux de réparation des dommages couverts par la garantie décennale sans qu’il y ait besoin d’une décision de justice. Les dommages couverts sont ceux qui compromettent la solidité de votre maison (par exemple, un affaissement du plancher) ou qui rendent votre maison inhabitable ou vous mettant en danger. Pour faire jouer la garantie dommages ouvrage obligatoire, il est primordial de vous adresser à un professionnel ayant souscrit la garantie décennale qui le prémunit des risques de son métier. Cette garantie décennale couvre la réparation des dommages intervenant après la fin du chantier, pendant une durée de 10 ans.
Cette assurance PNO propose en réalité une couverture identique à une multirisque habitation. En y ajoutant les garanties « recours de locataires » et « recours des voisins et des tiers », elle protège votre bien contre les risques de dégradations commises par le locataire.
Source : 25 millions de propriétaires et vous • N°569 janvier 2023
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Vous êtes copropriétaire ? Rendez-vous en page 24 de notre revue 25 millions de propriétaires pour retrouver des astuces afin d’aider votre syndic à réduire vos charges de copropriété !
Source : 25 millions de propriétaires et vous • N°569 janvier 2023
Le code civil fixe une série de règles sur le contrat de rente viagère. « La rente viagère peut être constituée à titre onéreux, moyennant une somme d’argent ou pour une chose mobilière appréciable, ou pour un immeuble » (art. 1968). Le cas qui nous intéresse est ici la vente immobilière.
Bouquet et rente
Comme dans toute vente, la vente en viager suppose un bien et un prix. Dans un premier temps, le bien doit être évalué comme dans une vente ordinaire. Dans un second temps, le prix est divisé en deux fractions. L’une est payée comptant, elle est qualifiée de « bouquet ». L’autre correspond à l’engagement de l’acquéreur de payer au vendeur une rente viagère, cette rente étant généralement payable par mensualités. Ces paiements sont aussi appelés arrérages.
Il faut distinguer cette vente en viager dont la contrepartie du bien est le paiement du bouquet et l’engagement de verser une rente avec une vente dont le prix a fait l’objet d’une conversion en rente viagère (avec ou sans bouquet). En effet, dans ce second cas, il s’agit alors d’une simple modalité du paiement du prix. Dans un arrêt de 2008 (Ass. Plén. 4 avril 2008, n° 07/14523), la Cour de cassation a jugé que si le prix a été converti en rente viagère, la rente n’est qu’une modalité de paiement du prix.
La distinction est importante car dans une vente moyennant rente viagère, il ne peut pas y avoir de rescision de la vente pour lésion alors que cette action sera ouverte dans le cas du prix converti en rente si le prix est trop faible (cf. infra).
Le montant de la rente est fonction de l’âge du vendeur. Il est calculé en fonction de son espérance de vie. Plus le vendeur est âgé et donc son espérance de vie moindre, plus la rente est élevée.
Le vendeur peut être un couple. Dans ce cas, la rente est sur deux têtes (cf. article 1972 du code civil). Elle peut être maintenue au même montant au premier décès. Elle peut aussi être réduite lors du premier décès. Le choix entre l’une ou l’autre de ces options est à fixer lors de la conclusion de la vente. La rente s’éteint avec le décès du vendeur.
L’acquéreur paie la rente, il est qualifié de débirentier. A l’inverse, le vendeur qui perçoit la rente est dit crédirentier.
Le montant de la rente étant fixé lors de la conclusion du contrat, la somme totale qui sera versée par l’acquéreur est donc incertaine. Si le vendeur décède rapidement, l’acquéreur aura alors acquis un bien pour un montant faible. A l’inverse, si le vendeur survit de longues années, l’acquéreur aura payé un montant supérieur à la valeur du bien. C’est dans cette incertitude que se trouve l’aléa.
Le montant du bouquet, et son importance par rapport à la valeur du bien, est librement fixé par les parties. Il correspond usuellement à un tiers de la valeur du bien. Un montant plus élevé est souvent prévu pour un vendeur très âgé.
Viager libre ou occupé
Autre élément de souplesse, la vente en viager peut être consentie libre ou occupée. Si le vendeur cède sa résidence principale, il est fréquent qu’il souhaite en conserver l’usage. Le viager est dit occupé. A l’inverse, s’il dispose d’une autre résidence ou s’il part en maison de retraite et qu’il n’a plus l’usage du bien vendu, le viager est qualifié de libre.
Enfin, les parties peuvent convenir, dans le cadre d’un viager occupé, que si le vendeur est conduit à quitter son logement, le montant de la rente sera majoré d’un montant prédéterminé.
Si le bien vendu est souvent la résidence principale du crédirentier, ce n’est pas la seule hypothèse de viager. Il est également possible de céder en viager une résidence secondaire ou un bien locatif. Mais l’intérêt est moindre pour un bien locatif car il est par hypothèse générateur de revenus. Le surcroît de revenu que le vendeur obtient par le viager est donc plus faible que lorsqu’il cède sa résidence principale.
L’objectif de la cession peut être autre que de générer un surcroît de revenus. Il peut se trouver dans la transmission du bien au bénéfice de l’acquéreur. La vente peut être consentie pour permettre à l’acheteur de financer progressivement l’acquisition du bien. C’est pour lui un autre moyen de financement que l’acquisition avec un emprunt classique. Au lieu de payer comptant le prix total, l’acquéreur s’acquitte régulièrement des arrérages et peut donc étaler la charge de paiement sur plusieurs années.
S’il existe des liens de famille entre le vendeur et l’acquéreur, il est particulièrement nécessaire de conserver la trace des paiements. Cette preuve est doublement nécessaire. Vis-à-vis des héritiers du vendeur, cela permettra de prouver que la vente était réelle et non une donation déguisée qui visait à privilégier l’acquéreur au détriment d’héritiers réservataires (les enfants notamment). Vis-à-vis de l’administration fiscale, cela permettra également de prouver qu’il s’agit bien d’une vente et non d’une donation. On sait en effet que les droits de donation sont bien plus élevés que les droits de mutation sur une vente et l’administration peut chercher à requalifier des ventes qui seraient en réalité des donations.
Usufruit ou droit d’usage et d’habitation ?
Le vendeur souhaite souvent se réserver l’usage du bien. Mais l’étendue de ce droit peut être plus ou moins vaste. Il peut s’agir d’un simple droit d’occuper le bien (droit d’usage et d’habitation) ou d’un droit d’utiliser le bien à titre personnel ou de le donner en location. Il s’agit alors d’un usufruit, le vendeur cédant la nue-propriété. Le prix de vente sera moindre pour la vente de la nue-propriété que pour la vente de la propriété avec une restriction portant simplement sur un droit d’usage.
L’acquéreur, qui devient donc nu-propriétaire du bien, doit veiller à être bien assuré. Toutefois, s’il subsiste un droit d’usage ou un usufruit au profit du vendeur, celui-ci doit souscrire une assurance habitation. Le débirentier pourra alors se limiter à souscrire une assurance au titre de propriétaire non-occupant.
Les cas opportuns et ceux qui le sont moins
L’une des difficultés de la vente en viager est de déterminer les cas dans lesquels elle est opportune et ceux dans lesquels il vaut mieux l’éviter.
Pour l’acquéreur, le viager doit prioritairement être envisagé comme un placement de long terme. Après avoir payé comptant le bouquet, le débirentier verse périodiquement la rente à son vendeur, ce qui constitue une sorte de paiement à crédit, de même qu’il le ferait à l’égard d’un banquier prêteur. Cela lui permet de se constituer un capital immobilier au fil des ans.
En revanche, il est plus délicat d’acheter en viager un bien qu’on a l’intention d’occuper soi-même à court terme, car cela risque de susciter des irritations avec le vendeur, si celui-ci restait dans les lieux plus longtemps que son espérance de vie ne le laissait supposer au départ…
L’intérêt d’acquérir un bien en viager occupé est également de ne payer que la nue-propriété : le vendeur conservant l’usufruit, le prix à payer pour l’acquéreur est donc moindre. Au décès du vendeur, l’acquéreur récupère la totalité du bien, en pleine propriété, sans avoir à verser de complément : l’usufruit s’éteint avec la mort de l’usufruitier et la pleine propriété se reconstitue sur la tête du nu-propriétaire. Cette opération se réalise sans droit de mutation.
Quant au vendeur, il lui faut être conscient qu’en vendant en viager, il se dessaisit d’un capital, son bien immobilier, en échange d’une rente viagère. Il en perd donc la propriété immédiatement lors de la vente et à son décès, la rente s’éteint. Si le vendeur a des enfants, ceux-ci ne retrouveront donc pas le bien cédé dans la succession. La vente en viager est donc particulièrement adaptée à une personne sans héritier direct qui ne va donc pas léser ses enfants.
Le code civil a prévu une règle particulière pour éviter des transactions qui auraient pour objet de briser l’égalité entre les héritiers de façon excessive. L’article 918 prévoit que lorsqu’un bien est vendu à un successible en ligne directe, à charge de rente viagère ou avec réserve d’usufruit, la valeur en pleine propriété du bien est imputée sur la quotité disponible. L’éventuel excédent est sujet à réduction. Autrement dit, la loi considère que vendre en viager à l’un de ses enfants est potentiellement source de déséquilibre par rapport aux autres enfants. La valeur du bien est donc imputée sur la quotité disponible, part de la succession dont on peut librement disposer, mais le surplus est réduit donc considéré comme s’imputant sur la part de réserve, pour ne pas désavantager les autres enfants.
Comment calculer la rente ?
« La rente viagère peut être constituée au taux qu’il plait aux parties contractantes de fixer ». Liberté contractuelle et clarté de l’expression sont ici la marque des rédacteurs du code civil (art. 1976).
La rente est calculée à partir des tables de mortalité qui indiquent l’espérance de vie des hommes et des femmes. L’espérance de vie est plus longue pour les femmes que pour les hommes, elle dépend aussi des conditions de travail qui ont été vécues pendant la vie active. Ces tables, l’une pour les hommes l’autre pour les femmes, sont périodiquement mises à jour pour tenir compte des variations de l’espérance de vie.
Des cabinets spécialisés dans la vente en viager ou votre notaire peuvent vous conseiller sur le taux à appliquer en fonction de l’âge du vendeur.
Le prix d’une vente doit être sérieux
La liberté de fixation de la rente ne doit pas dégénérer en abus car la loi permet l’annulation des ventes consenties à vil prix. Le prix peut être faible, il n’est pas interdit de faire une bonne affaire, mais il ne doit pas être dérisoire. La limite entre les deux n’est pas toujours nette mais la comparaison entre le montant de la rente et le revenu de l’immeuble vendu fournit un bon indicateur : si le premier est inférieur au second, il y a une forte probabilité que le prix soit insuffisant. Il est en effet a priori illogique de se défaire d’un bien pour une rente inférieure au loyer qu’on pourrait en percevoir.
Il a été jugé qu’une vente peut être annulée pour vileté de prix si les revenus du bien sont supérieurs à la rente fixée (Civ. 3ème, 16 nov. 2010, n° 09-17293 ; dans cette affaire, la rente était fixée à 2000 F par mois alors que le loyer était de 3000 F). Le prix a aussi été jugé dérisoire pour la stipulation d’une rente égale ou inférieure au revenu normal de la chose correspondant à sa valeur vénale au jour de la rente (Civ. 3ème, 9 déc. 1975).
La loi permet au vendeur qui a été lésé de plus des sept-douzièmes dans le prix de vente d’un immeuble de demander la rescision de la vente (art. 1674). Mais cette action en rescision pour lésion est en principe exclue pour les ventes aléatoires. La Cour de cassation l’a rappelé pour le cas d’une vente avec réserve de droit d’usage et d’habitation (Civ. 1ère, 19 juillet 1983). Règle traditionnelle : l’aléa chasse la lésion. Le montant total payé par le débirentier étant inconnu lors de la signature de la vente, la rescision pour lésion est donc a priori inapplicable. Mais lorsque les arrérages de la rente sont inférieurs aux revenus de l’immeuble, alors il n’y a plus d’aléa et la rescision peut être admise (Civ. 28 février 1951).
Si le prix est d’abord fixé en capital avant d’être converti en rente viagère, la vente n’est pas aléatoire et l’action en rescision pour lésion est alors possible (Civ. 1ère, 1er février 1960).
L’aléa disparaît également et apporte un risque de contestation de la validité du contrat, lorsque le vendeur est déjà malade au jour de la vente. Le code civil (art. 1975) prévoit ainsi la nullité de la vente lorsqu’elle prévoit une rente sur la tête d’une personne atteinte d’une maladie dont elle est morte dans les vingt jours de la date du contrat. Cette nullité est d’ordre public (Civ. 3ème, 10 nov. 1992, n°90-21.417).
Par ailleurs, si le délai de vingt jours est dépassé, mais qu’il est prouvé que l’acquéreur savait, le jour de la vente, que le décès était imminent, la vente peut aussi être annulée (Civ. 3ème, 2 février 2000).
L’indexation de la rente
Afin de préserver le pouvoir d’achat du vendeur et le prémunir des effets de l’inflation, le montant de la rente doit être indexé. Les perspectives actuelles de hausse plus vive des prix ne peuvent que confirmer la nécessité d’une clause d’indexation.
L’indexation est généralement pratiquée chaque année. Elle suit la clause prévue au contrat. La loi prévoit aussi un mécanisme visant à éviter que le vendeur subisse les effets de l’érosion monétaire. Si la rente n’est pas indexée, le vendeur bénéficie de la majoration légale. Cette majoration s’applique également si le taux légal est supérieur à l’indexation contractuelle.
L’administration publie chaque année un barème qui prévoit la majoration des rentes viagères. Le dernier a été publié au Journal officiel du 24 décembre 2021. Il fixe à 1,4 % la revalorisation des rentes servies en 2022 et fixe, selon la date de la rente originaire, le taux à appliquer à la rente.
Il existe enfin un mécanisme judiciaire de revalorisation de la rente. Ce mécanisme permet, au-delà des indexations légales, de tenir compte des circonstances économiques qui ont modifié la valeur de la contrepartie. Il est régi par la loi du 25 mars 1949 (art. 2 à 7). A l’inverse, le débirentier peut aussi solliciter une intervention du juge pour que la rente soit réduite en cas de circonstances nouvelles. Il revient au juge de fixer le montant de la modification à apporter.
Les garanties de paiement
Le service de la rente doit être assuré ponctuellement. C’est évi- demment l’intérêt du crédirentier mais c’est aussi l’intérêt bien compris du débirentier car les contrats de vente contiennent généralement des clauses strictes pouvant sanctionner une négligence de paiement par la résolution de la vente.
Le code civil permet (art. 1978) au crédirentier de faire saisir et vendre les biens de son débiteur. En revanche, il ne permet pas au crédirentier de faire annuler la vente faute de paiement des arrérages. Cette règle n’étant pas d’ordre public, il est possible d’y déroger (Civ. 3ème, 10 nov. 1992, n° 90-20.193).
La règle de l’article 1978 tranche avec le droit commun de la vente où, en cas d’absence de paiement du prix, le vendeur peut obtenir la résolution de la vente. On retrouve ici un effet de la distinction du contrat de vente moyennant rente viagère qui écarte la faculté d’obtenir judiciairement la résolution de la vente, et du contrat de vente dont le prix est converti en rente viagère qui autorise cette faculté.
Pour éviter de fragiliser la situation du crédirentier dans la vente moyennant rente viagère, il faut s’entourer de garanties contractuelles, notamment une hypothèque sur un bien de l’acquéreur.
Le débirentier doit assurer un paiement ponctuel de la rente. En effet, des retards réguliers de paiement peuvent constituer une inexécution fautive suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat de vente (Civ. 1ère, 4 janvier 1995, n° 92-17858). Dans cette affaire, le crédirentier avait dû plusieurs fois délivrer des commandements de payer pour obtenir le versement de la rente et celle-ci constituait l’essentiel de ses ressources. Il revient au juge du fond d’apprécier si le retard est d’une gravité suffisante pour que la résolution soit prononcée.
De même, un autre arrêt a admis la résolution de la vente dans un cas où la rente constituait pour le crédirentier un complément de revenu indispensable ayant un caractère alimentaire, et en écartant la demande de délais et le bénéfice de la bonne foi du débirentier (Civ. 1ère, 13 juillet 2004, n° 01-16443). Dans ces deux décisions, le contrat comportait un prix converti en rente, ce qui autorise l’action en résolution de la vente pour défauts de paiement de la rente, contrairement au cas de l’article 1978 qui écarte cette action pour les ventes moyennant rente viagère.
Il faut aussi être conscient que l’acquéreur engage son patrimoine… et le cas échéant celui de ses héritiers. La logique du contrat est que le vendeur décède avant l’acquéreur. Mais dans le cas inverse, le vendeur est fondé à demander la poursuite du paiement de la rente aux héritiers de l’acquéreur. Les héritiers sont donc tenus de la dette de leur auteur, sauf s’ils décident de renoncer à la succession.
Fiscalité
La fiscalité intervient lors de la vente et lors de la perception de la rente. La première étape est celle de la vente. La cession est susceptible de générer une plus-value imposable. Si le vendeur cède sa résidence principale, il est exonéré de plus-value selon les règles habituelles (art. 150 U du CGI).
Lorsque le vendeur perçoit la rente, cela constitue un revenu imposable (contrairement aux rentes issues de certains régimes de retraite). Mais les rentes viagères consenties à titre onéreux sont partiellement imposables, en fonction d’un barème qui tient compte de l’âge du vendeur lors du premier versement de la rente. Ce forfait est fixé une fois pour toutes.
Pour l’acquéreur, l’acquisition du bien donne lieu au versement de droits de mutation.
Pour un viager libre, l’assiette des droits de mutation est la valeur du bien qui est déclarée dans l’acte (cette valeur sert également de base au calcul des émoluments du notaire).
Pour un viager avec réserve d’usufruit, seule la nue-propriété étant transmise, c’est sa valeur qui constitue l’assiette des droits de mutation. Le raisonnement est identique pour un viager occupé.
Il est dangereux de minorer la valeur de la cession pour limiter l’impact des droits de mutation. En effet, cette pratique se heurte à deux écueils. Le premier est que la cession risque de faire l’objet d’un redressement fiscal. Le second est lié à la revente. Lors de cette transaction, l’acquéreur devra subir une imposition sur la plus-value et le prix d’achat qui a été minoré provoquera un surcroît d’imposition.
La revente du bien
L’acquéreur conserve généralement le bien jusqu’au décès du crédirentier. Mais les circonstances peuvent aussi inciter le débirentier à souhaiter se défaire de cette propriété. Il est possible de revendre le bien, bien que cela soit délicat.
Si le débirentier conserve la charge de la rente, il faut que le crédirentier accepte la mainlevée de l’hypothèque sur le bien vendu initialement et qu’un autre bien du débirentier soit grevé de l’hypothèque pour garantir le paiement.
Dans le cas où la charge de la rente est transmise au second acquéreur, il faut que ce transfert soit autorisé par le crédirentier, ce qui libère le débirentier d’origine. En pratique, il faut que le second acquéreur puisse présenter des garanties de solvabilité au moins aussi fortes que le premier acquéreur.
Les autres possibilités
Le viager le plus classique est celui où le vendeur conserve l’usufruit du bien qu’il occupait et perçoit la rente. Mais d’autres hypothèses sont possibles grâce à la souplesse de ce contrat.
• Le prêt viager hypothécaire
La vente en viager est un choix définitif. Mais il existe un autre type de contrat qui permet de recevoir de l’argent en donnant en garantie un logement qui vous appartient sans en abandonner la propriété. C’est le prêt viager hypothécaire.
Ce prêt a été organisé par les pouvoirs publics en 2006 dans le cadre de la réforme des sûretés puis réformé par l’ordonnance du 14 mars 2016. Il est régi par les articles L315-1 et suivants du code de la consommation.
Par ce contrat, une banque consent à une personne physique un prêt sous forme de capital ou de versements périodiques, garanti par une hypothèque constituée sur un bien immobilier de l’emprunteur à usage exclusif d’habitation. Le remboursement du prêt et des intérêts ne peut être exigé qu’au décès de l’emprunteur ou lors de la vente de l’immeuble ou du démembrement de propriété de l’immeuble, s’ils surviennent avant le décès.
Ce contrat permet à l’emprunteur de disposer d’un capital, par exemple pour effectuer des travaux, ou de percevoir des revenus réguliers. Le montant du capital versé dépend de l’âge de l’emprunteur et, bien sûr, de la valeur du bien concerné. Plus l’emprunteur est âgé, plus le montant du prêt peut être important. Le versement du capital par la banque n’est pas considéré comme un revenu et il n’a donc pas d’impact sur l’imposition du vendeur ou sur le montant des aides sociales. A l’inverse, la rente viagère est partiellement imposable.
Le prêt est remboursable au décès de l’emprunteur mais il peut être remboursé par anticipation.
Au décès, le prêt étant remboursable, deux cas peuvent se présenter :
- si la dette est supérieure à la valeur du bien, la différence est supportée par le prêteur. Les héritiers peuvent toutefois choisir de rembourser le prêt pour conserver le bien.
- si la dette est inférieure à la valeur du bien, la différence revient à la succession.
En pratique, très peu de banques proposent ce type de prêt et, quand elles le font, c’est selon un taux d’intérêt assez élevé.
• La rente au profit d’un tiers ou de deux époux
Une autre hypothèse tient au choix du bénéficiaire de la rente. L’article 1973 du code civil permet de constituer la rente au profit d’un tiers. Cette solution peut par exemple trouver un intérêt pour permettre à un enfant majeur handicapé, qui n’est pas apte à travailler, de disposer de ressources régulières.
L’article 1973 fixe aussi les incidences que peut avoir une rente réversible au profit du conjoint survivant. La réversion est présumée consentie à titre gratuit. Cette qualification a des conséquences importantes. Il est possible de la révoquer (l’article 1096 du code civil dispose que la donation de biens à venir faite entre époux pendant le mariage est toujours révocable). La fraction de la rente qui est donnée s’impute sur la quotité disponible et si cette valeur excède la quotité disponible, il est possible d’en obtenir la réduction.
En revanche, si la réversion de la rente est consentie à titre onéreux, la stipulation n’est pas révocable à partir du moment où elle est acceptée par le bénéficiaire (art. 1206 al. 2). Par ailleurs, elle ne s’impute pas sur la quotité disponible. Enfin, si le bien vendu dépendait de la communauté des époux, le bénéficiaire de la réversion devra une récompense à la communauté.
Par Bertrand Desjuzeur
La loi du 10 juillet 1965 impose au copropriétaire qui entend contester une décision d’assemblée générale des copropriétaires d’agir dans un délai strict de deux mois : “les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée sans ses annexes.” (art. 42, al. 2).
Cette règle permet d’assurer une sécurité juridique des décisions d’assemblée et de les exécuter sans risque de recours : si un copropriétaire contestataire veut remettre en cause la décision, il doit saisir la justice dans les deux mois de la réception du PV d’assemblée. Si aucune action n’est engagée, la décision est incontestable.
Ce délai court à compter du lendemain de la notification du procès-verbal. La loi de 1965, modifiée en 1985, imposait de notifier le procès-verbal dans les deux mois de la tenue de l’assemblée. La loi Elan du 23 novembre 2018 a ramené ce délai à un mois. Le syndic a tout intérêt à notifier sans retard le procès-verbal. En effet, d’une part, il engage sa responsabilité en procédant à une notification tardive ; d’autre part, cette négligence a pour effet de permettre aux copropriétaires de contester l’assemblée pendant un délai de 5 ans (CA Paris, 28 mai 1993).
Une assemblée avait voté la réfection de murets de clôtures d’un ensemble immobilier. Un copropriétaire refusait de payer la somme demandée par le syndic au motif qu’il s’agissait de parties privatives. Le tribunal avait donné gain de cause au copropriétaire en considérant que l’assemblée n’était pas compétente en la matière. Mais son jugement a été censuré par la Cour de cassation : “En statuant ainsi, alors qu’après expiration du délai de deux mois précité, les copropriétaires opposants ou défaillants sont déchus du droit de contester les résolutions adoptées, quand bien même elles porteraient atteinte aux modalités de jouissance de leurs parties privatives et leur imposeraient le paiement de charges, le tribunal a violé [l’article 42, alinéa 2, de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965]” (Civ. 3e, 12 janvier 2022, n° 20-20363).
Cet arrêt conforte la sécurité juridique des décisions d’assemblée. Il en résulte que la décision doit être respectée quand bien même elle imposerait des travaux sur des parties privatives. Le copropriétaire qui veut contester la décision doit agir dans le délai de deux mois ; à défaut, il doit payer les charges correspondantes bien qu’elles soient irrégulières.
À l’inverse, d’autres arguments ont pu permettre un recours au-delà du délai de deux mois. En effet, la rigueur de l’application de l’article 42 alinéa 2 de la loi de 1965 peut poser des difficultés lorsque des copropriétaires adopteraient sciemment une décision à une majorité irrégulière (article 24 au lieu de l’article 26 par exemple) et attendraient le délai de deux mois pour qu’elle devienne incontestable.
La notion d’abus de majorité peut être utilisée lorsqu’une décision a été prise alors qu’elle est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu’elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels de copropriétaires majoritaires ou au détriment des copropriétaires minoritaires (Civ. 3e, 17 décembre 2014, n° 13-25.134).
Un autre argument a pu être invoqué : la décision prise peut être affectée de vices (vices de forme ou de fond) tellement graves que la décision est inexistante. Certaines décisions ont admis ce raisonnement (CA Paris, 28 mars 2012, n° 09/28408).
Par exemple, si une assemblée décide qu’une partie privative devient partie commune. Cette sorte d’expropriation privée peut être contestée au-delà du délai de 2 mois (TGI Bayonne, 4 novembre 1974).
La Cour de cassation a semblé admettre qu’une décision pouvait être qualifiée d’inexistante si des graves vices sont prouvés (30 mars 2011, n° 10-14.381).
Mais plus récemment, elle a rendu un arrêt plus strict.
Un syndicat de deux copropriétaires avait pris une décision autorisant l’un d’entre eux à couvrir une terrasse, dans une réunion informelle non convoquée par un syndic. La cour d’appel avait jugé la décision inexistante et que faute d’accord de la copropriété, les travaux avaient été effectués irrégulièrement.
Mais la Cour de cassation a censuré ce raisonnement : “en statuant ainsi alors que les irrégularités d’une assemblée générale, tenant à une absence de convocation ou à une convocation irrégulière à la suite de l’expiration du mandat du syndic, ne rendent pas les décisions prises inexistantes mais annulables, et qu’une décision d’assemblée générale existe dès qu’une question est soumise à l’ensemble des copropriétaires et est sanctionnée par un vote, la cour d’appel a violé [l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l’article 7 du décret du 17 mars 1967] ” (Civ. 3e, 13 novembre 2013, n° 12-12084).
Cette décision est symptomatique de la rigueur de la Cour de cassation pour faire obstacle aux recours qui se prolongent dans le temps. Elle est publiée au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation, ce qui est un signe de l’importance que lui attache la Cour de cassation. L’irrégularité du mode de décisions, ici une réunion informelle, est sanctionnable puisqu’un copropriétaire peut en demander l’annulation. Mais il doit agir dans le délai de deux mois. À défaut, la décision devient définitive.
Si une assemblée prive un copropriétaire de son droit de jouissance d’une partie de son lot, sa décision a pu être jugée inopérante (CA Paris, 29 mai 2008). La cour d’appel de Paris a pu admettre que si l’assemblée intervient hors de son champ de compétence, elle prend une décision inopérante qui ne peut pas faire courir le délai de l’article 42 (CA Paris, 17 avril 1996). Plus récemment, la cour de Paris a été plus stricte et a jugé que le délai de deux mois s’applique même si des résolutions attaquées portent atteinte à l’exercice des droits de jouissance privative des copropriétaires (CA Paris, 6 février 2013).
Un copropriétaire contestait la décision d’assemblée qui avait voté une décision de traitement préventif contre les termites, y compris à l’intérieur des parties privatives. La Cour de cassation a admis que “la violation de l’objet légal du syndicat défini à l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 pouvait rendre inopérante une décision prise par l’assemblée générale en dehors de sa compétence”. Mais elle a validé l’arrêt de la cour d’appel qui avait “retenu qu’en l’espèce la décision de traitement préventif contre les termites s’analysait comme un acte de conservation de l’immeuble entraînant des travaux que les copropriétaires avaient l’obligation de supporter même à l’intérieur de leurs parties privatives » (Civ. 3e, 30 janvier 2007, n° 06-13.886).
Il en résulte que si la décision est jugée inopérante (ce qui n’était donc pas le cas dans cet arrêt de 2007), le copropriétaire peut agir au-delà du délai de deux mois car la décision ne peut pas faire courir le délai de deux mois de l’article 42 (CA Paris, 17 avril 1996).
Un autre angle d’attaque est le mode de décision qui a été retenu. Il est tellement irrégulier que la décision prise n’est qu’une pseudo-décision et qu’elle n’a pas de valeur d’assemblée. Ce peut être le cas par exemple pour une décision prise hors assemblée (Civ. 3e, 24 avril 2013, n° 12-14.593). Dans cette affaire, un règlement de copropriété avait été approuvé par les deux copropriétaires et la cour d’appel avait considéré que la décision était valable. Mais la Cour de cassation a jugé que la cour d’appel aurait dû « rechercher si le règlement de copropriété avait été approuvé par une assemblée générale ».
Enfin, il se peut que la décision prise soit contraire à une règle impérative de la loi de 1965. Après avoir pris une position inverse, la Cour de cassation admet désormais qu’il est possible de contester la décision même après le délai de 2 mois (Civ. 3ème, 27 septembre 2000, n° 98-22.792 et l’arrêt de 2008 ci-dessous).
La Cour de cassation rappelle le principe et admet une exception : une cour d’appel retient exactement « qu’une fois expiré le délai de deux mois prévu à l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, les délibérations d’assemblées [deviennent] définitives et opposables à tous, sans que leur validité soit susceptible d’être ultérieurement remise en cause par voie d’action principale ou par voie d’exception quel que soit le degré de gravité des irrégularités constatées, qu’il n’en [va] autrement que pour les décisions modifiant irrégulièrement une répartition des charges, sans respecter les critères de l’article 10 de la loi, s’agissant d’une action relative aux clauses réputées non écrites en vertu de l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965 ». (Civ. 3e, 18 novembre 2008, n° 07-18.823).
En l’espèce, le recours introduit après le délai de 2 mois est jugé irrecevable car il ne s’agissait pas d’une décision modifiant irrégulièrement une répartition des charges, sans respecter les critères de l’article 10 de la loi.
- Quel délai respecter lorsque le délai de deux mois est jugé inapplicable ?
Dans certains des cas précédemment évoqués, la jurisprudence admet un recours au-delà du délai de deux mois prévu par l’article 42. La question se pose alors de savoir pendant combien de temps il est possible d’agir. Schématiquement, depuis la loi Elan du 23 novembre 2018, le délai de principe de dix ans qui était prévu par l’article 42 a été remplacé par un renvoi au droit commun (art. 2224 du code civil). Cet article prévoit un délai de 5 ans pour les actions personnelles (par exemple, action en réparation d’un dommage ou en remboursement de charges indues). En revanche, pour les actions réelles (par exemple, action en vue de faire cesser un empiètement), le délai prévu par l’article 2227 est de 30 ans. Par ailleurs, les actions fondées sur l’article 43 visant à faire juger une clause non écrite sont imprescriptibles (Civ. 3e, 23 janvier 2016, n° 14-26921).
Pour conclure
La lecture des différents arrêts montre donc à premier regard une certaine diversité de situations. Peut-être les magistrats sont-ils sensibles à des situations qui peuvent paraître très injustes lorsqu’une décision irrégulière semble menacer gravement les droits d’un copropriétaire.
Mais les arrêts les plus importants, ceux de la Cour de cassation, sont de façon générale favorables à une application stricte de la règle de l’article 42 al. 2 de la loi de 1965. C’est donc la volonté d’assurer la stabilité juridique des décisions prises par le syndicat des copropriétaires qui prévaut.
Le délai de deux mois pour agir doit donc être impérativement respecté.
Cette lecture, et en dernier lieu l’arrêt de janvier 2022, doit inciter les copropriétaires à la vigilance. Si leur droit est bafoué par une décision inique du syndicat de copropriétaires, ils doivent contacter d’urgence un avocat pour qu’il engage une action pour contester la décision d’assemblée. Il ne suffit pas d’envoyer une lettre recommandée ; il faut intenter une action judiciaire. Laisser passer le temps en pensant qu’une décision est tellement irrégulière qu’elle pourra être contestée plus tard est un mauvais choix…
Bertrand Desjuzeur • Journaliste
]]>Le décret indique que le plafond de loyer pour 2022 est fixé à partir des loyers calculés par les observatoires de loyers en fonction des références de loyers de 2018, révisés en fonction de l’IRL(2) (selon la variation de l’IRL entre le 3e trimestre 2017 et le 3e trimestre 2021). Pour les zones non couvertes par un Observatoire des loyers, ce sont les références de la carte des loyers du ministère du logement qui serviront de base au calcul. Une nouvelle actualisation aura lieu en 2023 et il est prévu pour 2024, une nouvelle estimation des loyers de marché.
Le montant de la décote permettant d’obtenir le plafond de loyer est également confirmé : 15 % pour une location intermédiaire, 30 % pour une location sociale et 45 % pour une location très sociale. Le site internet monprojet. anah.gouv.fr permet de connaître en ligne le montant du loyer plafond suivant les communes.
Ces plafonds varient suivant le type de location, le lieu de situation du logement et la composition du foyer du locataire.
Le contribuable doit joindre à sa déclaration de revenus les documents suivants : copie de la convention conclue avec l’Anah, du bail et de l’avis d’imposition du locataire. Le décret fixe les modèles de conventions à conclure entre le bailleur et l’Anah suivant les différents cas :
- secteur locatif intermédiaire pour un logement sans subvention pour travaux,
- secteur locatif social pour un logement sans subvention pour travaux,
- secteur locatif intermédiaire et social pour un immeuble ou un ou plusieurs logements avec subvention pour travaux,
- secteur locatif intermédiaire et social pour un logement loué dans le cadre d’un bail à ferme avec subvention pour travaux.
L’arrêté précise les exigences de performance énergétique des logements qui entrent dans le dispositif Loc’Avantages :
- Pour les baux conclus ou renouvelés au plus tard le 31 décembre 2027, les logements ne doivent pas être classés F ou G ;
- Pour les baux conclus ou renouvelés au plus tard le 1er janvier 2028, ils ne devront pas non plus être classés E.
Source : 25 millions de propriétaires • N°562 mai 2022
* (in tableau n°1) : Réduction d'impôt des locations Loc'Avantages
[1] Voir notre dossier de février 2022 (pages 14 à 16)
[2] Indice de référence des loyers
[3] (in tableau n°2) : Non applicable
[4] (in Tableau 3) Pour les locations intermédiaires : chiffres correspondant aux locations de 2021 (non publiés pour 2022, a du 2 du I de l’article 2 terdecies D par renvoi du a du 2 de l’article 2 terdecies G de l’annexe III au CGI)
]]>La loi distingue les locataires colocataires et les locataires cotitulaires. La cotitularité du bail ne peut découler que de deux situations civiles légales : le mariage ou le pacte civil de solidarité, mentionné pacs dans la suite de l’article. A noter, les partenaires pacsés bénéficient de la cotitularité du bail depuis la loi ALUR de 2014[1].
La notion de mariage n’est pas définie par un article unique du Code civil, de nombreux articles en posent les conditions qui forment ainsi le cadre juridique du mariage.
Le mariage est une union de deux personnes, célébrée par un officier d’état civil dans les conditions prévues par le Code civil.
Le pacs est précisément défini à l’article 515-1 du Code civil : « Un pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune. »
Le mariage et le pacs sont tous deux inscrits en marge des actes d’état civil.
La colocation est un régime juridique de la location inscrit dans la loi du 6 juillet 1989. A ce sujet, relire le dossier « Le B.A.-BA de la colocation » paru dans le numéro 557 de décembre 2021.
Le concubinage est une union de fait précisée à l’article 515-8 du Code civil : « Le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple. ».
Le concubinage confère des droits sur le bail au concubin du locataire lorsque ce dernier les perd. Le contrat de location continue au profit du concubin si le logement est abandonné par le locataire et lui est transféré en cas de décès du locataire, uniquement si le concubin est dit notoire, l’exigence étant qu’il vivait dans le logement avec le locataire depuis au moins un an à la date de l’abandon ou du décès[2].
Tout ou presque est inscrit à l’article 1751 du Code civil qui est la source légale de la cotitularité du bail :
« Le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l'habitation de deux époux, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire et même si le bail a été conclu avant le mariage, ou de deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité, dès lors que les partenaires en font la demande conjointement, est réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
En cas de divorce ou de séparation de corps, ce droit pourra être attribué, en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause, par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation de corps, à l'un des époux, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l'autre époux.
En cas de décès d'un des époux ou d'un des partenaires liés par un pacte civil de solidarité, le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité survivant cotitulaire du bail dispose d'un droit exclusif sur celui-ci sauf s'il y renonce expressément. »
La cotitularité du bail se définit par le fait que deux locataires aient des droits et des obligations identiques sur le contrat à l’égard du bailleur.
Elle suppose que le logement objet du bail réponde à quatre conditions cumulatives :
- le logement est mis à disposition à titre onéreux, excluant les conventions d’occupation gratuites[3] ;
- il s’agit de la résidence principale et non d’une résidence secondaire ;
- il s’agit du domicile commun à l’exclusion des locaux dans lesquels les conjoints ou partenaires vivent séparément ;
- le logement est occupé à usage exclusif d’habitation[4] ;
Elle est légale et automatique. Elle s’acquiert dès lors que l’un des époux est titulaire d’un contrat de location servant à la résidence principale des conjoints. Ainsi, lorsqu’une personne signe un bail et se marie par la suite, son conjoint est de plein droit automatiquement ajouté comme titulaire du bail, alors même qu’il n’était pas partie au contrat initial.
Lorsque le couple est déjà marié avant la signature du bail, le principe de cotitularité s’applique également alors même que le contrat est signé par un seul des deux époux.
Elle est également légale mais pas automatique. Elle ne peut s’appliquer que sur demande conjointe des partenaires pacsés auprès du bailleur. Elle est néanmoins de droit lorsque les partenaires la demande, le bailleur ne peut pas la refuser.
Si des partenaires de pacs ne demandent pas la cotitularité du bail, la location se trouve dans l’une des deux situations juridiques suivantes :
- le bail est signé par un seul et l’autre est occupant sans droit ni titre vis à vis du bailleur ;
- le bail est signé au nom des deux, ils sont alors colocataires.
Un seul époux ou un seul partenaire peut signer le bail et le conjoint ou le partenaire n’ayant pas signé le bail sera cotitulaire du bail par l’effet de l’article 1751 du Code civil. La conséquence étant que chacun d’eux est tenu des obligations vis-à-vis du bailleur et notamment du paiement des loyers et des charges.
En vertu de l’article 220 du Code civil, les époux sont tenus solidairement des contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants.
Cela signifie que le bailleur pourra poursuivre en paiement un seul des époux.
Par l’article 515-4 du Code civil, la situation est identique en matière de pacs : « les partenaires liés par un PACS sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante ».
Lorsqu’il est encore candidat locataire ou en cours de location, le locataire doit informer le bailleur de sa situation civile ou de la modification de celle-ci.
La cotitularité s’impose de plein droit au bailleur lorsque le locataire se marie en cours de location ou qu’elle est demandée par les locataires par suite d’un pacs. Dans cette situation, le bailleur est obligatoirement informé de la naissance de la cotitularité mais cela ne règle pas l’éventuelle fin de celle-ci.
Comment un bailleur peut-il être informé de l’existence d’un conjoint ou d’un partenaire pacsé du locataire ou du candidat locataire ?
Lors de la mise en location, le bailleur est en droit de demander un certain nombre de pièces justificatives, mais l'acte de mariage ou la convention de pacs, et enfin le livret de famille ne peuvent pas être exigés[5].
Certains justificatifs d’état civil peuvent permettre d’avoir connaissance du mariage. La pièce d’identité et le passeportpeuvent préciser le nom d'usage à la suite du nom de famille. Cela reste optionnel et ces titres d’identité peuvent ne pas être à jour de la situation civile.
Autre possibilité, une imposition commune possible pour les couples mariés ou pacsés qui peut, à condition d’être à jour, être relevée sur l’avis d’imposition.
Pour de nouveaux locataires, en raison de la nécessité d’avoir les bonnes informations à l’instant T de la signature du bail, l’idéal est de leur faire remplir et signer une fiche candidat locataire afin que ces derniers attestent de leur situation civile.
En cas d’acquisition de la cotitularité en cours de bail par mariage, les locataires devront être en mesure de prouver que l’information a bien été donnée au bailleur de l’existence d’un conjoint. Une démarche positive est une lettre recommandée avec avis de réception ou une remise en main propre contre émargement.
En l’absence d’une démarche positive du locataire, le bailleur bénéficie d’une protection afin d’éviter qu’il ne subisse les conséquences d’une cotitularité qu’il ignore.
Ainsi, l’article 9-1 de la loi du 6 juillet 1989 dispose : « Nonobstant les dispositions des articles 515-4 et 1751 du code civil, les notifications ou significations faites en application du présent titre par le bailleur sont de plein droit opposables au partenaire lié par un pacte civil de solidarité au locataire ou au conjoint du locataire si l'existence de ce partenaire ou de ce conjoint n'a pas été préalablement portée à la connaissance du bailleur. »
Les locataires ne peuvent donc pas soulever des nullités de procédure, par exemple contester un congé donné à la seule épouse en méconnaissance du mariage, lorsque les époux n’ont pas informé par une démarche positive le bailleur de leur mariage.
Selon les tribunaux, ne démontre pas l’existence d’une démarche positive d’information du bailleur de la cotitularité :
- des quittances de loyer établies en cours de bail au nom du locataire et de son épouse : le commandement de payer, délivré au seul mari, a été jugé opposable à l’épouse[6] ;
- des loyers réglés par chèque bancaire au nom de l’épouse : la procédure d’expulsion engagée à l’encontre du locataire a été jugée opposable à l’épouse[7] ;
- la notification par le bailleur d’une augmentation de loyer à « Monsieur et Madame » et par son conseil d'un arriéré de loyers à « Monsieur et Madame » : le congé notifié uniquement à monsieur a été jugé opposable à madame, les époux ne pouvant justifier d’une démarche positive[8].
Avec un couple marié ou pacsé, quel nombre d’exemplaires pour une lettre de révision du loyer, de régularisation des charges, de notification de travaux... ?
En vertu du principe de cotitularité, le bailleur est tenu de respecter la double notification aux époux ou aux partenaires s’il a été informé de l’existence d’un conjoint ou du partenaire pacsé.
Dans l’hypothèse inverse où le bailleur ignore l’existence du conjoint ou du partenaire pacsé, les notifications faites au seul locataire connu sont, de plein droit, opposables au conjoint ou au partenaire pacsé.
La cotitularité étant une protection spéciale instituée pour le logement loué en raison du statut civil de locataires mariés ou pacsés, lorsque ce statut disparaît la cotitularité également.
La solidarité des époux cesse lorsque le jugement de divorce est devenu définitif par transcription du divorce sur les registres de l’état civil[9], celui-ci devenant opposable aux tiers et donc au bailleur à compter de cette date. Il en est de même en cas de jugement de séparation de corps.
L’époux ou l’épouse divorcé qui a quitté le logement loué n’est plus redevable vis-à-vis du bailleur des obligations contractuelles lorsqu’il a donné congé, la cotitularité légale et conventionnelle ayant cessé.
Si le logement est attribué à l’un des époux par le juge, cela s’impose au bailleur, même si cela diminue les garanties de paiement du bailleur dans la mesure où la solidarité entre époux disparait.
A défaut de divorce la cotitularité se poursuit. Alors même que le logement ne sert pas à l’habitation de deux époux séparés, la solidarité des dettes se poursuit et le conjoint qui n’a jamais occupé le logement peut être poursuivi en paiement d’arriérés de loyer et de charges par le bailleur dans la mesure où il a loué le logement pour « l’entretien du ménage »[10].
Lorsque le pacs prend fin, la cotitularité cesse à la date de transcription de la dissolution du pacs sur les registres de l’état civil. Néanmoins, la procédure d’attribution du logement en cas de divorce n’a pas d’égal concernant le pacs. Si une mésentente nait entre les ex-partenaires pour la conservation du logement loué, la loi ALUR de 2014[11] est intervenue pour proposer une procédure inscrite à l’article 1751-1 du Code civil :
« En cas de dissolution du pacte civil de solidarité, l'un des partenaires peut saisir le juge compétent en matière de bail aux fins de se voir attribuer le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l'habitation des deux partenaires, sous réserve des créances ou droits à indemnité au profit de l'autre partenaire. Le bailleur est appelé à l'instance. Le juge apprécie la demande en considération des intérêts sociaux et familiaux des parties. »
Fin de la cotitularité en cas de violence
La loi ELAN a créé une exception au principe de solidarité entre conjoints, via l’article 8-2 de la loi du 6 juillet 1989, et donc à la cotitularité du bail en cas de violence conjugales.
« Lorsque le conjoint du locataire, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin notoire quitte le logement en raison de violences exercées au sein du couple ou sur un enfant qui réside habituellement avec lui, il en informe le bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, accompagnée de la copie de l'ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales dont il bénéficie et préalablement notifiée à l'autre membre du couple ou de la copie d'une condamnation pénale de ce dernier pour des faits de violences commis à son encontre ou sur un enfant qui réside habituellement avec lui et rendue depuis moins de six mois.
La solidarité du locataire victime des violences et celle de la personne qui s'est portée caution pour lui prennent fin le lendemain du jour de la première présentation du courrier mentionné au premier alinéa au domicile du bailleur, pour les dettes nées à compter de cette date. ».
Cette disposition n’a pas de caractère automatique, il faut une ordonnance de protection. Le fait de quitter le logement ne suffit pas à éteindre la solidarité et donc la cotitularité.
Le conjoint ou le partenaire survivant bénéficie d’un droit de jouissance temporaire qui lui permet de rester aux frais de la succession dans le logement loué pendant un an, la succession devant lui rembourser les loyers réglés au propriétaire bailleur[12].
Ce conjoint ou partenaire survivant bénéficie également d'un droit exclusif sur le bail d’habitation sauf s’il y renonce expressément par application de l’article 1751 du Code civil. Ce droit s’impose au bailleur.
Autre précision intéressante apportée par la Cour de cassation « l'article 1751 du code civil accorde au conjoint survivant un droit exclusif sur le logement qui servait effectivement à l'habitation des époux avant le décès, sauf renonciation de sa part, non invoquée en l'espèce, et retenu à bon droit que ce droit exclusif prive les héritiers qui vivent dans les lieux au moment du décès du preneur de tout droit locatif en présence d'un conjoint survivant »[13].
Le bail peut prendre fin par une résiliation judiciaire, par exemple par l’effet d’une clause résolutoire en cas d’impayés, mais plus classiquement par l’effet de congés pour lesquels la cotitularité entraîne des règles spécifiques, de forme pour le bailleur, de fond pour les locataires.
Le bailleur doit délivrer le congé aux deux époux ou partenaires pacsés. Deux lettres recommandées avec avis de réception distinctes adressées à chacun seront nécessaires[14]. A défaut, le congé est inopposable au conjoint ou au partenaire pacsé qui ne l’a pas reçu. L’accusé réception signé par un seul des conjoints ne peut pas engager l’autre alors même qu’ils étaient destinataires d’une lettre de congé unique aux deux noms.
Une exception à ce principe existe lorsque le bailleur détient un mandat établi par un cotitulaire donnant pouvoir à l’autre de réceptionner toutes les notifications inhérentes au contrat de location. Ce mandat est extrêmement rare en pratique car sa rédaction doit être suffisamment claire et précise pour éviter toute remise en cause.
Il est conseillé au bailleur de donner congé par acte d’huissier afin d’éviter une situation ou l’un retire le recommandé et pas l’autre. Dans ce cas, l’intervention d’un huissier serait inévitable.
La Cour de cassation[15] a précisé que « l'article 1751 du Code civil n'impose pas une notification par huissier de justice par acte séparé à chacun des époux cotitulaire du bail ».
Rappelons que le bailleur n’est pas tenu de la double notification s’il ignorait l’existence d’un conjoint ou d’un partenaire pacsé (article 9-1 de la loi 6 juillet 1989).
Le congé, donné par un des époux ou un des partenaires, n‘a pas d’effet à l’égard du cotitulaire du bail[16]. Il ne lui est pas opposable même s’il n’habite plus le logement. Pour autant, celui qui a donné congé reste solidaire, et c’est en cela la particularité de la cotitularité qui de ce point de vue protège le bailleur.
Souvent par méconnaissance des règles de la cotitularité, lorsque des cotitulaires du bail se séparent, qu’un quitte le logement loué et qu’ultérieurement celui qui y est resté donne son congé, ils pensent tous deux être dégagés de l’engagement locatif alors qu’aucun des deux ne l’est.
A défaut de divorce ou de dissolution du pacs, la fin de la solidarité des locataires sur le logement ne peut venir que de la résiliation du bail, chacun adressant son congé au bailleur.
Céline Capayrou, Juriste UNPI 31-09
Source : 25 millions de propriétaires • N°560 mars 2022
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[1] Loi n°2014-366 du 24 mars 2014 article 4
[2] Article 14 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs
[3] Civ 3e, 13 mars 2002, n° 00-17.707
[4] Civ 3e 28 janvier 1971, n° 69-13.314
[5] Décret 2015-1437 du 5 novembre 2015 fixant la liste des pièces justificatives pouvant être demandées au candidat à la location et à sa caution
[6] CA Lyon, 2 juillet 2015, n° 13/01162
[7] Civ 3e 29 octobre 2013, n° 12-23.138
[8] Civ 3e 19 octobre 2005, n° 04-17.039
[9] Civ 3e 22 octobre 2015, n°14-23.726
[10] Civ 1re 7 novembre 1995, n° 92-21.276
[11] Loi n°2014-366 du 24 mars 2014 - art. 4
[12] Article 763 et article 515-6 du Code civil
[13] Civ 3e, 28 juin 2018, n° 17-20.409
[14] Civ 3e, 10 mai 1989, n° 88-10.363
[15] Civ 3e, 18 juillet 2000, 96-13.798
[16] Civ 3e 19 juin 2002, n° 01-00.652